Ils étaient plus d’une centaine, enseignants, mais aussi parents et élus de la République, rassemblés devant le siège de la Direction des services départementaux de l’Éducation nationale (DSDEN) des Yvelines, à Guyancourt, le 6 mars. À l’appel d’une intersyndicale, ils étaient mobilisés contre les réformes prévues dans l’Éducation nationale à la rentrée prochaine. Dans le viseur des manifestants, notamment le fameux choc des savoirs voulu par le gouvernement, et se caractérisant entre autres, à partir de septembre 2024, par la mise en place de groupes de niveau en français et maths au collège. Des pancartes « réforme bâclée imposée, débâcle assurée », « école du tri, non merci », ou encore « Les parents soutiennent les professeurs », étaient brandies.

« Il s’agit bien, avec le choc des savoirs, de pratiquer une loterie des élèves avec une forme de ségrégation. D’une part, les groupes de niveaux sont contre-productifs à bien des égards, avec une mixité sociale éducative remise en question, et une dégradation des conditions de qualité de travail de la communauté éducative », dénonce Nicolas Bodin, secrétaire départemental Unsa éducation.

21 collèges étaient mobilisés, dont l’essentiel situés à SQY. Parmi eux, le collège de La Clef de Saint-Pierre, à Élancourt. « Alors qu’il y a des problèmes à résoudre qui nécessitent des mesures importantes, le ministère, incapable de mettre des professeurs devant les élèves, trouve rien de mieux à faire que de désorganiser l’enseignement avec des groupes de niveaux dont on connaît l’inefficacité », déplore Tanguy Simon, professeur de français au sein de l’établissement.

« On a des retours de chefs d’établissement qui nous disent qu’elle ne sera pas possible la réforme, affirme Antonio Gonçalves, élu CFDT et professeur au collège Blaise Pascal de Plaisir. Il y a des petits collèges, par exemple, où il n’y a que deux classes de 6e, on va stigmatiser les élèves dès la rentrée de 6e et créer des silos. […]. Actuellement, on est en train de demander à des collègues de CM2 de faire des listes de tableaux Excel d’élèves pour des classes de niveaux pour la rentrée prochaine. […] À 10 ans maintenant, on va décider de la filière dans laquelle on va enfermer un enfant, car on connaît les phénomènes de résignation dans lesquels les élèves risquent de s’enfermer, et le manque de moyens qui vont empêcher les enfants de pouvoir évoluer d’un groupe à un autre. »

Outre le choc des savoirs et les groupes de niveaux, le manque de moyens accordé aux établissements était aussi au cœur des revendications, avec le soutien d’élus locaux, présents devant la DSDEN, comme le maire DVG de Guyancourt, François Morton, ou le député LFI de la 11e circonscription des Yvelines, William Martinet. Ce dernier a pointé « la logique comptable qui écrase l’Éducation nationale » et « le tri social » avec « ces groupes de niveaux, dont on sait tous, car il y a l’expérience pédagogique, la recherche scientifique, […] que ça ne va pas aider les élèves à réussir, et qu’au contraire, la conséquence sera d’aggraver les inégalités. »

« On n’est pas seulement contre le choc des savoirs, mais aussi pour un modèle de société et d’école qu’on veut défendre, a souligné un délégué CGT. Si on fait ce métier, ce n’est pas pour coller des étiquettes mais pour accompagner les élèves qui en ont besoin. » Des opérations « collèges morts » étaient prévues le lendemain de la mobilisation, ainsi qu’un rassemblement devant le rectorat de Versailles. Un engagement, comme d’autres ailleurs en France, qui a visiblement payé, puisque le gouvernement a présenté, le 7 mars, une version édulcorée de la réforme, où le libre choix est laissé aux chefs d’établissement de mettre en place ou non les groupes de niveaux.