Le conseil départemental des Yvelines organisait le 2 juin une table ronde autour de l’éducation à la santé sexuelle. Un rendez-vous en amont de la Semaine de la santé sexuelle, programmée du 5 au 12 juin. Cette table ronde se déroulait au centre de santé sexuelle de Plaisir. Ouvert il y a un an et demi, il est intégré à la Maison Calypso, destinée aux femmes victimes de violences, au sein de la résidence La Pommeraie.

Ce centre est l’un des huit centres de santé sexuelle des Yvelines. « On a des missions médicales et aussi des missions d’aller vers les populations, dans l’éducation, la vie affective, relationnelle et sexuelle, explique Alice Huynh, médecin référent du centre de santé sexuelle de Versailles et médecin coordinateur du centre de santé sexuelle dans le département. C’est gratuit, chez nous, tout est pris en charge par la sécu. »

Cette médecin généraliste faisait partie des intervenantes de la table ronde, en compagnie notamment de sa collègue Sylvie De Gasperi, conseillère conjugale et familiale au centre de santé sexuelle de Versailles, et d’Edwige Pichon, infirmière spécialisée en sexothérapie et fondatrice du compte Instagram Wicul, qui compte plus de 200 000 followers et où elle publie régulièrement des contenus décalés liés à l’éducation sexuelle. Avec ce slogan indiqué sur sa description : « Amour du [cul] (écrit par un emoji représentant une pêche, Ndlr) et pédagogie. » « Durant ma carrière, j’ai pu constater que l’éducation sexuelle manquait dans la santé mentale. […] Mais finalement, je me suis rendu compte qu’il y avait une énorme demande de patients en général, donc j’ai créé un compte Instagram pour faire de l’éducation à la santé et au plaisir sexuel », évoque-t-elle.

Le fléau de l’« éducation » sexuelle par le porno

« Il est intéressant de croiser nos regards pour parler d’éducation à la sexualité, parce que, finalement, la sexualité, c’est omniprésent dans notre société, juge Alice Huynh. Je pense que je vais apprendre plein de choses avec Edwige. […] C’est une personnalité à part entière, qui a plein de choses intéressantes à dire. »

Durant le colloque, il a surtout été question de sexualité chez les jeunes. Sylvie De Gasperi indique que ce sont en majorité des adolescents et jeunes adultes qui poussent la porte des centres de santé sexuelle. Et principal changement dans l’éducation sexuelle des jeunes générations, le fait d’être dans « une société hypersexualisée », et influencée par « la déferlante » de la pornographie , estime la conseillère conjugale et familiale. Edwige Pichon rapporte elle un chiffre édifiant : l’âge moyen de visionnage du 1er contenu pornographique est de 10 ans, selon une étude d’Opinionway menée en 2020 auprès de 250 mineurs franciliens âgés de 15 à 17 ans. Pour la fondatrice de Wicul, le porno donne à voir « des corps normés auxquels on n’arrive pas du tout à s’identifier, la banalisation de la violence sexuelle. »

Du côté des centres de santé sexuelle, on active notamment les leviers de la sensibilisation dans les écoles et on peut aussi aider à « retrouver un dialogue » entre un jeune et ses parents, – souvent pris de court face à la fameuse question « Comment on fait les bébés », et dont le rôle s’avère fondamental, affirme Sylvie De Gasperi. La conseillère conjugale et familiale pense notamment qu’il faut partir de la vision du jeune de la sexualité pour ensuite la déconstruire, et « répondre en dédramatisant » et mettre en avant « les choses qui sont incontournables », comme « le respect du corps, la connaissance des parties intimes et de ce que la loi interdit ». Elle l’assure aux parents : « Plus vous allez parler avec vos enfants, plus l’enfant pourra venir vers vous pour parler. »