Mieux identifier, mieux réprimer, mieux former et mieux sensibiliser. Tels sont les quatre axes portés par le plan départemental de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie, dont les contours ont été dévoilés ce mardi 22 février. Signé entre la préfecture, le parquet de Versailles et l’académie, ce plan propose 22 actions ciblant à la fois les réseaux sociaux, mais aussi la sensibilisation auprès des mineurs et du grand public.

Qautre axes d’action

« J’avais quand même été marqué […], à quel point les discriminations, le racisme, l’antisémitisme ne faisaient pas l’objet d’un suivi spécifique par les services de la préfecture, alors même que dans les quartiers prioritaires, en politique de la ville, ces questions sont très présentes, explique de la nécessité du projet le préfet à l’égalité des chances, Raphaël Sodini. […] On voyait qu’il y avait beaucoup d’initiatives qui existaient çà et là, […] mais finalement ça manquait peut-être d’un cadre structurant, d’un cadre cohérent et d’un cadre qui nous lie sur plusieurs années. »

Selon les chiffres des forces de l’ordre yvelinoises, 151 faits de racisme et d’antisémitisme ont été enregistrés en 2021, contre 14 actes de haine anti-LGBT. L’une des priorités consiste à mieux caractériser ces faits lors des enquêtes ou des comparutions. « On sait bien qu’il y a actuellement des faits qui passent complètement sous le radar et l’idée c’est que ce qui existe déjà soit pris en compte », insiste Maryvonne Caillibotte, procureure de la République.

Directeur de l’association France victimes 78, Jonathan Portier abonde en ce sens : « On a parfois des gens qui viennent pour une agression dans un véhicule. En les interrogeant, on comprend qu’il y a aussi certains propos qui ont pu être tenus, mais ce n’est pas le plus important pour eux. Il faut faire prendre aussi conscience aux victimes. »

Un dyptique « répression-éducation »

Ces propos pourraient donc constituer des circonstances aggravantes. « Il n’y a pas de raison de s’en dispenser, il faut qu’on s’habitue les uns les autres à relever ces faits-là qui contextualisent de manière assez différente, plus complète, un fait qu’on va retenir de manière assez classique », détaille Maryvonne Caillibotte, évoquant le cadre de rebellion.

Pour autant, Raphaël Sodini souhaite avant tout s’appuyer sur un diptyque de « répression-éducation », notamment auprès des mineurs. « Si on regarde ce qu’il s’est passé autour de l’attentat contre Samuel Paty, on est tombés sur des gens, outre des jeunes qui diffusaient la photo etc., qui étaient totalement inconscients de la gravité de ce qu’ils faisaient, de la portée de ce qu’ils faisaient », se rappelle Maryvonne Caillibotte.

Le tribunal a déjà signé une convention avec le Mémorial de la Shoah en mai 2021, il espère prochainement en signer une avec la Maison Zola – Musée Dreyfus à Médan. « Cela permettrait d’orienter un nombre très [important] de mineurs qui font l’objet de mesures alternatives, des mesures de composition pénale et qui, là aussi, très souvent, sont très peu sanctionnés, argue Philippe Toccanier, vice-procureur. Le fait d’avoir un lieu mémoriel, d’avoir une proposition de stage sur une journée, avec une formation théorique et une visite permettrait, semble-t-il, certainement d’améliorer le niveau et la qualité de réponse. »

Pour autant, sans évolution législative, sanctionner les propos haineux peut s’avérer difficile, malgré la création d’un pôle spécifique au parquet de Paris. «  Ce contre quoi on essaie de lutter, c’est la partie sombre des réseaux sociaux, […] avec plusieurs difficultés, note Philippe Toccanier. Déjà, le problème de l’anonymisation des réseaux sociaux, avec une non-coopération parfois de ces réseaux pour pouvoir nous donner l’identité des personnes […]. Le Parquet national de lutte contre la haine a été une très bonne chose, ça permet de mettre la lumière sur un certain nombre de dossiers qui sont beaucoup plus médiatiques et scientifiques, mais au niveau des parquets locaux on a aussi besoin de s’armer par rapport à cela et d’étoffer nos moyens de lutte. »

CREDIT PHOTO : LA GAZETTE EN YVELINES