Ils sont actuellement plus d’une centaine, mais l’été prochain, il n’y aura plus personne. Kuehne + Nagel, groupe suisse de logistique implanté à l’international, va fermer son site de Trappes, où il emploie 69 salariés fixes, une trentaine d’intérimaires, et une quinzaine de travailleurs handicapés. Les employés, qui y construisent des pièces détachées pour le transport routier, sont en grève la semaine dernière pour dénoncer ce transfert d’activité à Lieusaint, en Seine-et-Marne, à une soixantaine de kilomètres.

« Ils proposent 37 postes […] mais, ils ont dit tout de suite ‘‘On sait très bien que la majorité ne va pas suivre’’ », confie José Manuel Teixeira, délégué FO et membre du CSE (Comité social et économique), rencontré le 17 novembre devant l’usine, où les salariés étaient mobilisés. « Nous dénonçons le PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi) en lui-même. Il n’est pas à la hauteur du groupe. Nous appartenons à un grand groupe qui a les moyens », affirme Aristide Djahouri, délégué CGT du personnel, trésorier au CSE, également magasinier et cariste au sein de l’entreprise.

Une centaine de personnes sur le carreau

« C’est un PSE économique alors que le groupe fait des chiffres extraordinaires », abonde José Manuel Teixeira, tandis qu’Alexis Rival, secrétaire du CSE et délégué syndical CGT, évoque des résultats du groupe qui, « au niveau mondial, sont excellents », mais « au prix de leurs salariés ». Des salariés qui estiment que la décision a été annoncée « par des courriers en recommandé, au mois de mai », déplorent les syndicats au sujet de cette fermeture qui aurait été décrétée à l’initiative du client de Kuehne + Nagel, CNHI Iveco.

« C’est eux qui demandent à ce que l’activité soit bougée, mais, derrière, Kuehne et Nagel n’assument absolument pas le fait de dire ‘‘Nous, on a 70 personnes, on en fait quoi ?’’. C’est juste inacceptable », peste Alexis Rival. Le délégué CGT rapporte que le groupe leur aurait justifié le transfert d’activité par le fait « que le bâtiment est vétuste et que ça coûterait trop cher de le rénover, sauf qu’il n’y a absolument aucune étude qui a été faite dessus, on ne sait même pas combien ça aurait coûté. » Il assure en revanche que « l’investissement à Lieusaint coûte plus cher que le plan de sauvegarde ici ».

Les départs seraient prévus en deux phases et devraient commencer dès le mois prochain, selon les syndicats. « Une première phase de licenciements est prévue mi-décembre, pour une trentaine de personnes, et la deuxième vague en juin 2022 », précise Aristide Djahouri. « Tous [les salariés] sont déboussolés. On a la boule au ventre, résume-t-il. C’est notre activité, notre emploi que nous perdrons. Derrière, c’est des familles. On est laissés pour compte, sur le carreau, sans moyens. »

Il souligne que certains salariés ont « 30 ou 40 ans de boîte ». « On ne tient [pas compte] de l’ancienneté et de ce qu’on a investi pour que la boîte tienne », soupire son homologue de FO, José Manuel Teixeira. « Ces dernières années, on a vraiment redressé la barre, on a notamment amélioré la rentabilité de la boîte, et on ne récoltera absolument rien », avance quant à lui Alexis Rival.

Le tribunal administratif saisi pour faire annuler le PSE

La grève a été reconduite jusqu’au lundi 22 novembre minimun, jour de bouclage de notre édition. Selon certains syndicats, elle ne devait à priori pas se poursuivre au-delà.Les salariés se sont par ailleurs tournés vers le tribunal administratif dans le but d’annuler le PSE, annonce Aristide Djahouri.

S’ils n’obtiennent pas gain de cause, ils espèrent des compensations financières de leur direction. « S’ils veulent fermer leur site, qu’ils mettent les moyens, et que chaque salarié parte dignement », réclame le délégué du personnel, jugeant que pour l’instant, « c’est des miettes qu’ils nous proposent ». Contactée, Kuehne + Nagel n’a pu être jointe avant la mise sous presse de cette édition.