La pollution de l’air en milieu extérieur est un sujet qui est dans presque toutes les têtes. La qualité de l’air à l’intérieur des véhicules l’est beaucoup moins, alors qu’elle peut s’avérer encore plus polluée. L’Estaca, école d’ingénieurs située à Montigny-le-Bretonneux, a justement commencé à travailler sur ce sujet à partir de 2015. Pour approfondir ce travail, elle a lancé en septembre 2020 le projet AmCoAir, soit Amélioration des connaissances de la qualité de l’air dans un habitacle automobile.
Étudier « ce qui est relargué par l’habitacle »
Les premières études ont donc été conduites entre 2015 et 2019, avec le projet Captihv (Caractérisation et analyse des polluants issus du transport automobile infiltrant les habitacles de véhicules), en partenariat avec AirParif et l’Ademe. Avec des mesures réalisées en circulation réelle, l’Estaca a cherché à savoir « quels sont les paramètres qui influencent l’infiltration de ces polluants », à savoir « les polluants particulaires, les gaz Nox (les oxydes d’azote, Ndlr) et le CO2 », en faisant varier les paramètres externes (type d’infrastructure routière, trafic, trajet, etc.) et les paramètres internes au véhicule (mode et débit de la ventilation, climatisation, ouverture des vitres, etc.), détaille Amine Mehel, enseignant-chercheur dans l’équipe qualité de l’air et dépollution de l’Estaca.
« Ça nous a permis de gagner pas mal en connaissances », résume Amine Mehel. Le nouveau projet AmCoAir va servir à compléter ces premières recherches. « On ne va pas s’intéresser uniquement à ce qui s’infiltre de l’extérieur, [mais] surtout à ce qui est relargué par l’habitacle lui-même, poursuit l’enseignant-chercheur, précisant qu’AmCoAir va analyser les émissions de composés organiques volatils (Cov), Ozone et Nox. L’habitacle, c’est plusieurs matériaux, plusieurs composants chimiques : colle, vernis, moquette, etc. On a certains types de Cov qui nous viennent de l’extérieur, mais la majorité sont relargués directement par les matériaux de l’habitacle. »
D’autant qu’Amine Mehel souligne que si ces questions commencent à être réglementées pour les constructeurs dans certains pays asiatiques, ce n’est pas encore le cas en Europe. L’objectif est donc de « cerner un peu plus quels sont les paramètres qui favoriseraient l’infiltration et surtout le relargage à l’intérieur de l’habitacle », indique-t-il, précisant que ces études poussées pourraient aider les constructeurs au cas où la réglementation européenne évoluerait.
Vers un pilotage intelligent de la ventilation ?
Ces mesures, l’Estaca va de nouveau en réaliser en circulation réelle, mais aussi, et surtout, dans un environnement totalement contrôlé. L’équipe d’AmCoAir est pour cela en train de construire une bulle en plexiglas à l’Estaca, avec une Peugeot 3008 à l’intérieur, dans laquelle les polluants seront injectés à des concentrations contrôlées. Les paramètres de la ventilation de la voiture seront aussi pilotés depuis l’extérieur de la bulle.
AmCoAir présente un triple objectif. Le premier est « le rapport complet qui doit nous permettre de dire quels sont les paramètres qui favoriseraient des concentrations en polluants plus élevées dans l’habitacle, que ce soit des polluants issus de l’extérieur ou relargués par l’habitacle lui-même », indique Amine Mehel. Le projet va aussi permettre de proposer des protocoles de mesures de ces polluants « afin de garantir une rigueur scientifique aux futures données », précise l’Estaca dans un communiqué. Le troisième objectif est de « consolider la stratégie du pilotage intelligent de la ventilation grâce à une série d’expérimentations », poursuit le communiqué.
Les toutes premières mesures sont prévues d’ici juin et le projet s’étale sur une durée de trois ans. Ce dernier est mené par deux équipes de recherche de l’Estaca, est financé par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), en collaboration avec PSA, Ariamis et l’Utac Ceram. Des étudiants de l’école d’ingénieur pourront ainsi découvrir les métiers de la recherche, et certains pourront participer au programme.