Faire les soldes avec un couvre-feu à 18 h ne va pas faciliter la reprise économique des magasins. À l’Espace Saint-Quentin, le 20 janvier, le premier jour des soldes d’hiver ne semble pas avoir fait revenir massivement les clients. « Hier, il n’y a pas eu beaucoup de fréquentation. Malheureusement, on est en perte de visiteurs », constate le lendemain matin David Machado, manager du magasin H&M de l’Espace Saint-Quentin. À 9 h 45 ce 21 janvier, ils sont 11 clients dans l’enseigne de vêtements.
Selon lui, son magasin connaîtrait une perte du chiffre d’affaires estimée à moins 30 % par rapport à janvier 2019. Et cette situation est très similaire à d’autres enseignes du même territoire, tels que Nocibé, La Sellerie ou encore Carrefour. « On était en vente privée pendant trois semaines, ça n’a pas attiré plus de monde. […] On a beaucoup trop de perte en janvier. C’est une catastrophe », fait le bilan Mélodie Baudouin, vendeuse chez La Sellerie, un commerce de maroquinerie. Tous font pourtant en sorte de s’adapter aux restrictions sanitaires pour faire revenir le client.
La plupart ouvrent plus tôt. « Ceux qui embauchent pour faire la fermeture du magasin arrivent à 10 h au lieu d’arriver à midi », explique le manager du H&M à l’Espace Saint-Quentin. Pour le premier jour des soldes, Nocibé a même ouvert à 8 h, sinon l’ouverture se fait à 9 h.
C’est finalement Carrefour qui est le plus matinal avec une ouverture prévue à 7 h 30, « pour essayer de fluidifier et éviter que tout le monde ne vienne à la même heure », justifie Sylvain Guine, stagiaire directeur du magasin à l’Espace Saint-Quentin. En plus, le magasin ouvre tous les dimanches de janvier de 9 h à 18 h. Ce qui n’est pas le cas de tous les commerces. Tout dépend du gérant Hammerson, qui décide des horaires d’ouverture des magasins de l’Espace Saint-Quentin.
Les commerces sont le plus souvent en effectif complet. « On n’a plus le droit d’embaucher mais il y a le même […] effectif qu’avant la crise », affirme Clémence Gomez, vendeuse chez Nocibé. De même chez H&M, « on n’a pas de chômage partiel », assure le manager de l’enseigne. Ces commerces ont d’ailleurs conservé le click and collect.
Mais les clients semblent frileux à l’idée de passer plus de temps dans les magasins. « Ce qui pèche, c’est le pouvoir d’achat qui a diminué pour tout le monde, analyse David Machado, sachant qu’à H&M, les cabines d’essayage ne sont pas accessibles. Ça pèche pour la vente. » Alors, les clients achètent sur internet. Mais certains magasins en pâtissent, comme Cash express, où l’on achète et vend des produits d’occasion. « C’est pour éviter le contact en magasin », explique Benjamin Meynard, à la tête de la franchise.
D’autres préféreraient épargner. « On ressent beaucoup de retenue. […] Les gens ont peur de ce qui va se passer donc ils sont moins dépensiers. Ils entendent parler de licenciements, alors ils font plus d’économie », constate la vendeuse de La Sellerie. Pour autant, ce matin-là, une cliente s’est fait plaisir en s’achetant un nouveau sac à main, en précisant qu’elle n’en avait pas spécialement besoin.
Le couvre-feu à 18 h n’arrangerait pas non plus la fréquentation. « On perd 20 % de notre chiffre d’affaires entre 17 h et 19 h 30. On perd la clientèle du bureau qui passe après le travail », affirme Claudia Mole, la responsable du nouveau magasin de décoration Maison Zola, arrivé en juin 2020 à l’Espace Saint-Quentin. À 17 h les visiteurs sont pressés et se dépêchent de rentrer chez eux, observe-t-elle.
Il n’y aurait donc pas de pic de fréquentation entre 17 h et 18 h. À Carrefour, le flux est plutôt calme pendant cette période, selon Sylvain Guine. « La vague de fréquentation qu’on avait entre 18 h et 19 h, pendant le couvre-feu de 20 h, ne s’est pas répercutée avec le couvre-feu de 18 h, explique-t-il. Il va plutôt y avoir un pic entre midi et deux. »
Et encore, ce dernier n’a rien à voir avec le trafic d’avant crise. En un an, le magasin Carrefour de l’Espace Saint-Quentin a perdu 500 000 articles qui passaient habituellement en caisse, entre midi et 14 h. En cause notamment, le télétravail et la fermeture des universités.