Rien ne va plus pour la fibre à Montigny-le-Bretonneux. Déconnexions régulières, pannes à répétition, coupures, débranchements d’abonnés intempestifs, armoires saccagées et « un service client aux abonnés absents », face à la détresse des habitants, « la Ville relaie l’appel au secours des administrés », a expliqué Lorrain Merckaert (DVD), le maire de Montigny-le-Bretonneux, lors de la conférence de presse organisée sur le sujet le 6 février.

Et ce n’est pas la première fois. Depuis trois ans maintenant, consciente du mécontentement et de la grogne qui montent, la mairie de Montigny-le-Bretonneux n’a de cesse d’alerter sur les nombreux dysfonctionnements de la fibre qui touchent son territoire. Avec les échéances qui arrivent, la municipalité a décidé de monter au créneau aux côtés de ses administrés. En effet, à moins de six mois des Jeux olympiques et paralympiques qui vont en partie se dérouler dans la commune, des milliers de visiteurs et spectateurs vont déferler et pour une part résider dans la ville. Et, aujourd’hui, l’inquiétude est d’autant plus grande que, d’ici quelques mois, la fin programmée du réseau cuivré sera effective et tous ses abonnés seront obligés de passer à la fibre.

Pour rappel, la ville de Montigny-le-Bretonneux avait bénéficié durant des années d’un réseau cuivré innovant en coaxial, conférant aux habitants un accès à internet inédit en ville nouvelle. Le passage à la fibre optique, d’abord déployé par Orange comme dans de nombreuses communes de Saint-Quentin-en-Yvelines, est ensuite assuré par SFR, via sa filiale Xp Fibre, opérateur d’infrastructure, à la demande de l’autorité régulatrice des télécommunications, l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse). L’objectif était à ce moment-là d’éviter une situation de quasi-monopole d’Orange sur la fibre dans l’agglomération. Depuis, rien ne va plus.

« Ce n’était pas notre demande, rappelle fermement le maire de Montigny-le-Bretonneux. Mais le quotidien sur ce réseau se traduit par des armoires régulièrement ouvertes et des installations qui ne se font pas dans les règles de l’art. In fine, les administrés et les professions libérales subissent des pannes longues, sans alternative et avec un service après-vente absent. » La Ville décide d’intervenir en sécurisant les armoires (point de mutualisation) dont elle n’est pas propriétaire, en installant un cadenas sur la dizaine d’armoires les plus problématiques.

« Les opérateurs devaient récupèrer la clef auprès de la police municipale, mais, malheureusement, le système n’a pas eu l’efficacité escomptée : plus de 50 cadenas fracturés depuis, explique le maire. Avant de préciser qu’en « 2023, nous avons entamé un dialogue avec l’Arcep, sans grand succès également. Certes, il y a eu quelques avancées : le nombre de sous-traitants a été réduit et une procédure d’intervention a été redéfinie. Ultime solution de recours, l’armoire la plus vandalisée a fait l’objet d’une reprise complète par la Ville, mais, en 2024, les appels des administrés alertant des pannes et débranchements sauvages sur ce mobilier ont repris. C’est un cercle vicieux sans fin. »

Xp Fibre et les opérateurs en cause

Entre 2020 et 2023, ce sont ainsi plus de 170 plaintes qui ont été recueillies par les services de la Ville, de très nombreuses relances de demandes d’intervention adressées à Xp Fibre laissées sans réponses… « Nous recevons régulièrement le directeur régional d’Xp Fibre pour faire avancer les choses et, à chaque fois, j’ai toujours un message positif, mais on est face à une inertie complète avec pas de son, pas d’image. Aucune solution n’est proposée », assure Lorrain Merckaert. Pire, le gestionnaire du réseau estime que 99 % de son réseau est actif et qu’il ne « resterait que 600 logements à fibrer en attendant les accords des copropriétés, relève le maire. Or, on se demande sérieusement si le réseau est bien dimensionné. SFR gère aussi Numéricâble avec le coaxial qui fonctionnait plutôt bien, mais qui n’est pas du niveau de la fibre. Et nous sommes particulièrement inquiets avec la fin du cuivre, parce que 4 000 personnes sont encore branchées sur d’autres canaux que la fibre. »

De plus, c’est le parcours du combattant pour réussir à joindre les opérateurs. Chacun se renvoie la balle entre l’opérateur d’infrastructure et les quatre grands opérateurs commerciaux (Free, Bouygues, Orange, SFR). À 75 ans, Denise, une habitante du Village invitée pour témoigner à la conférence de presse, explique qu’elle n’a plus la fibre depuis septembre : « Tous les mois, quelqu’un intervient pensant que je suis une nouvelle abonnée. Ils nous disent que ce n’est pas eux mais SFR. Je suis en immeuble HLM et on me dit de leur écrire. Je n’ai plus la TV. Nous avons un droit à l’image, et même la société HLM leur a écrit et rien ne change. Bouygues dit que c’est de la responsabilité de SFR. Un technicien de Bouygues Telecom est encore venu hier. La société HLM envoie des électriciens, mais ils ne peuvent rien faire. »

Le maire, Lorrain Merckaert, tenait le 6 février une conférence de presse pour relayer « l’appel au secours des administrés » et maintenir la pression sur les opérateurs et l’Arcep.

Comble de l’ironie, le cas de Jean-Gabriel, 70 ans, qui réalise des audits pour l’Arcep entre autres, et qui se voit appliquer des pénalités de retard, par l’Arcep, parce qu’il ne peut pas livrer ses audits en temps et en heure… faute de réseau ! « J’avais l’ADSL et, il y a quatre ans, je suis passé à la fibre parce que je travaille chez moi et que j’ai besoin de débit, raconte-t-il. Depuis, je n’ai que des soucis. Cela tombe régulièrement et pourtant je travaille dans la partie. Quand je contacte les gens que je connais, ils me disent que la ligne fonctionne. Ils ne testent que de chez eux à l’armoire. De l’armoire à chez nous, ils n’ont aucune visibilité. Il n’y a pas assez de prises et ils déconnectent pour se brancher. C’est un bordel dans les armoires. Quand je pense qu’on va tous passer à la fibre, comment vont-ils faire avec des armoires complètement pleines ? C’est une catastrophe. »

Et de souligner : « En Bretagne, dans le village, nous sommes 200 et nous n’avons aucun problème. Ici, nous sommes connus, nous allons avoir les JOP et rien ne fonctionne. »

Et malheureusement, à Saint-Quentin-en-Yvelines, Montigny-le-Bretonneux est la seule commune à connaître de telles difficultés. « Lorsque j’ai posé la question à mes collègues de SQY lors d’un conseil des maires pour savoir s’ils avaient les mêmes problèmes que nous, ils me répondent tous que non. Dans les autres villes, avec un autre opérateur propriétaire et gestionnaire du réseau, les problèmes n’ont pas lieu de la même façon, pas avec la même importance. J’entends cependant parler des mêmes problèmes dans d’autres villes de France avec d’autres opérateurs que le nôtre. Mais à SQY, nous sommes la commune qui rencontre le plus de difficultés et avec une absence de réponses », lance Lorrain Merckaert.

Et de fulminer : « Je ne peux pas entendre l’histoire de la sous-traitance parce qu’elle (la sous-traitance) est payée par les opérateurs. Le système est organisé par les opérateurs, donc c’est à eux de trouver une solution. C’est eux qui les paient. Pour moi, il y a une responsabilité d’Xp Fibre en tant que gestionnaire du réseau, responsabilité partagée avec les autres opérateurs, et l’Arcep devrait s’impliquer davantage et être à la hauteur pour que le système fonctionne. Tous les mois, les opérateurs perçoivent les forfaits, même s’il y a des procédures de remboursements. »

La mairie de Montigny-le-Bretonneux va continuer à mettre la pression sur les opérateurs et sur l’Arcep : « Je vais voir avec les parlementaires ce que l’on peut mettre en œuvre », assure Lorrain Merckaert. « Il faut que nous puissions avoir un réseau fibré qui fonctionne de manière pérenne », conclut le maire.


Une panne géante est survenue sur le réseau Free

Le jeudi 8 février, les abonnés Free ont eu la mauvaise surprise de se réveiller sans internet et avec un réseau mobile dégradé, voire inexistant. Selon l’opérateur, il s’agirait d’un chantier du Grand Paris (la ligne de métro Grand Paris Express) qui aurait sévèrement endommagé un câble comprenant 144 fibres. Cette panne géante aura principalement touché les secteurs de Montigny-le-Bretonneux, de Guyancourt, de Plaisir, d’Élancourt, de Coignières, de Maurepas et de La Verrière pour ce qui concerne Saint-Quentin-en-Yvelines ainsi que nombre de communes dans le département des Yvelines. Consciente du problème, la société Free a entamé des travaux très rapidement, mais ils ont malheureusement pris du retard, au grand dam des abonnés qui ne sont pas gênés pour le faire savoir sur les réseaux sociaux. Le samedi 10 février au matin, Free annonçait que les réparations avaient été terminées dans la nuit du 9 au 10, mais le réseau n’était pour certains usagers toujours pas revenu à la normale après cette annonce, entraînant encore des coupures sur la fibre ainsi que sur le réseau téléphonique. Un sujet particulièrement sensible pour tous les opérateurs.


 

PHOTO 1 : ILLUSTRATION