Àcompter du 1er janvier 2024, conformément au droit européen et à la loi antigaspillage de 2020, le tri des biodéchets sera généralisé et concernera à la fois les professionnels, les communes et les particuliers. Dans ce cadre, l’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines va mettre en place une vaste expérimentation de tri à la source à destination des ménages tout au long de l’année 2024.
Le choix du compostage
Une obligation légale que nuance Jean-Michel Chevallier, élu de Voisins-le-Bretonneux et conseiller communautaire délégué à la collecte et à la valorisation des déchets. « Ce qu’il est important de rappeler, c’est que l’obligation qui pèse sur Saint-Quentin-en-Yvelines est d’apporter une solution de tri à la source des déchets, explique l’élu. On entend trop souvent qu’à partir du 1er janvier 2024 tous les Français auraient une obligation de composter. C’est faux. L’obligation est d’organiser le tri à la source des biodéchets ; ce n’est pas du tout la même chose. Les biodéchets, c’est soit les restes alimentaires ou végétaux. SQY doit apporter une solution à la source pour ces deux éléments-là. Cela peut être soit une gestion sur place soit une collecte séparée et après une solution de traitement, peu importe laquelle. L’obligation est le traitement à la source. »
Compétent en matière de gestion des déchets depuis 2016, l’Établissement public de coopération intercommunale (EPCI) de Saint-Quentin-en-Yvelines s’est déjà lancé dans le déploiement du compostage depuis quelques années. Alors c’est tout naturellement que l’Agglomération a fait le choix de cette solution comme réponse au tri à la source. « Le choix qui a été fait à Saint-Quentin-en-Yvelines est de partir sur ce que nous savons faire, souligne Jean-Michel Chevallier. Depuis 2019, nous avons lancé un grand plan compostage qui fonctionne plutôt bien. Nous en sommes à 3 700 composteurs individuels distribués. Nous avons 27 sites de compostage en pied d’immeuble-quartier, et 26 sites de compostage pédagogique ou autres (écoles, gendarmerie de Magny-les-Hameaux, les pompiers de Montigny-le-Bretonneux, etc.). »
Et de préciser : « En pied d’immeuble, ce sont des spots de compostage en accord avec les ASL ou les copropriétés. L’exigence que nous mettons en place, c’est qu’il y ait deux référents que nous allons former sur une journée complète. Ensuite, nous fournissons gratuitement le matériel et nous les accompagnons. À l’échelle du quartier, c’est un peu différent quand on n’a pas forcément identifié de possibilité sur des collectifs au travers de copropriétés ou d’ASL, là, nous allons plutôt nous appuyer sur une association et nous allons essayer de développer à l’échelle du quartier.
54 000 tonnes d’ordures ménagères par an
« Aujourd’hui, nous en avons cinq de déployés essentiellement à Guyancourt, Montigny-le-Bretonneux, Plaisir et Élancourt, poursuit-il. On s’appuie plus sur une association et des jardins partagés. Une collecte de biodéchets sera gérée par l’association qui va s’occuper de la collecte, de la qualité des biodéchets, de la maturation, etc., de la transformation du biodéchet en compost qui sera utilisé ensuite localement sur les jardins partagés et autres. »
Et l’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines assure porter une ambition forte en matière de compostage. D’autant que toute cette démarche repose sur le volontariat. « L’objectif est à terme d’arriver à 12 000 composteurs individuels (33 600 maisons à SQY). On va multiplier par trois, espère l’élu communautaire. En partagé, on s’est fixé sur 700 pieds d’immeuble (64 500 appartements) et 160 quartiers équipés. Nous visons sur 10 % d’ici à 2029. C’est un déploiement de quatre ans. Nous avons lancé une étude voilà deux ans, assistés d’un cabinet spécialisé, et en 2024 nous serons dans la phase d’expérimentation. Nous faisons partie des rares collectivités à en être déjà à cette étape-là. Ensuite, nous ferons le déploiement entre 2025 et 2029 avec un rythme de croisière en 2029. »
Et d’ajouter : « Nous sommes précurseurs à SQY. Très peu de communes ont lancé l’étude et nous avons très peu d’expériences sur lesquelles nous appuyer. […] Personne ne développe le plan de compostage que nous mettons en place. Nous serons les premiers à le tester, dans diverses situations, ce qui nous permettra de dresser l’ensemble des situations et de voir si cela fonctionne partout ou s’il y a des trous dans la raquette. Ce scénario a l’avantage d’être réversible, sans ajouter un bac supplémentaire, déjà que nous ne savons pas où mettre le 3e bac dans bien des cas. Nous investissons uniquement dans des composteurs, sans collecte supplémentaire. »
Avec ce plan compostage, l’Agglomération espère économiser 2 500 tonnes par an, soit 10 kg par an par habitant, sur une population de 240 000 âmes. Depuis 2019, tout ce qui a été mis en œuvre contribue à faire baisser le tonnage chaque année avec les filières de récupération (déchetteries, vêtements, articles de sport, le tri, la généralisation du tri des emballages, etc.). « Nous diminuons la quantité d’ordures ménagères collectées et incinérées. Cela va dans le bon sens », se réjouit Jean-Michel Chevallier.
Pas de baisse de la TEOM
Et si Saint-Quentin-en-Yvelines va réaliser quelques économies sur la TGAP (Taxe générale sur les activités polluantes), payée à l’État sur chaque tonne d’ordures ménagères incinérées (SQY produit 54 000 tonnes/an), la TEOM (Taxe d’enlèvement des ordures ménagères) payée par les Saint-Quentinois ne devrait pas diminuer pour autant. « Malheureusement, les économies que cela va générer restent inférieures au coût de la mesure, regrette l’élu. Tout comme en passant au tri. Nous avons récupéré des recettes sur ce qui était trié, mais ces recettes ne couvraient pas les dépenses supplémentaires : on a ajouté des bacs, des collectes, et cela coûte. »
Et de préciser que, pour le compostage, « nous allons injecter des composteurs. Nous avons une brigade de maîtres-composteurs estimée à une vingtaine de personnes qui va gérer tous ces composteurs pour gérer les milliers de points que nous voulons développer. Cela coûte forcément cher. Nous allons faire des économies sur le tonnage incinéré, mais cela ne suffira pas à compenser la mesure supplémentaire. Cela va nous permettre en revanche de ne pas augmenter la TEOM jusqu’en 2029, comme le montrent toutes les projections financières », conclut Jean-Michel Chevallier.
Qu’est-ce qu’un biodéchet et à quoi sert-il ?
Selon le code de l’environnement, le biodéchet est un « déchet non dangereux biodégradable de jardin ou de parc, un déchet alimentaire ou de cuisine provenant des ménages, des bureaux, des restaurants, du commerce de gros, des cantines, des traiteurs ou des magasins de vente au détail, ainsi qu’un déchet comparable provenant des usines de transformation de denrées alimentaires ». Les déchets à traiter sont les déchets verts (tontes de pelouse et fauchage, feuilles mortes, tailles d’arbustes, haies et brindilles ou encore déchets ligneux issus de l’élagage et de l’abattage d’arbres et de haies) et les déchets alimentaires (restes de repas ou de préparation de repas ou produits périmés non consommés).
Pourquoi et comment engager le tri à la source des biodéchets ? Les biodéchets représentent un tiers des déchets non triés des Français et présentent cependant de nombreux bénéfices : réduire le bilan carbone du secteur des déchets à travers la réduction du stockage et de la combustion des déchets ; produire du biogaz qui peut être soit destiné à un usage local, soit réinjecté dans le réseau de gaz naturel, et fournir les agriculteurs ou gestionnaires d’espaces verts en engrais organiques et ainsi améliorer la qualité agronomique des sols.
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