En quête d’innovation, l’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines va tester le système de transport autonome sur rail, Urbanloop. Une expérimentation que ne se fait pas dans n’importe quel cadre, mais bel et bien dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques qui se dérouleront sur une partie de son territoire en 2024. « Nous cherchons à innover et, pour avancer, il faut bien financer à un moment des prototypes, avait expliqué Jean-Michel Fourgous (LR), le président de Saint-Quentin-en-Yvelines, lors du vote d’une subvention en décembre 2022, et ainsi renforcer l’attractivité et la visibilité de Saint-Quentin-en-Yvelines. Même si je ne peux pas vous garantir que cela fonctionnera. »
800 000 euros pour SQY
L’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines a ainsi mis pas loin de 800 000 euros sur la table. « Sur un montant total de 5 millions d’euros, l’aide de l’État est de 2,1 millions d’euros ce qui montre bien la fiabilité du projet et, pour SQY, le coût avoisine les 800 000 euros, c’est tout à fait absorbable », assure Jean-Baptiste Hamonic (MoDem), maire de Villepreux et vice-président de Saint-Quentin-en-Yvelines chargé des transports.
À son échelle, Saint-Quentin-en-Yvelines participera donc à l’effort collectif en testant ce nouveau mode de transport qui se dit d’ores et déjà « champion du monde du transport écologique ». Pour mener à bien cette expérimentation, l’Agglomération a obtenu la délégation de compétence innovation d’Île-de-France Mobilités (IDF Mobilités, ex-Stif). « C’est le témoin de la marque de confiance accordée à SQY sur les expérimentations de mobilité innovantes », se réjouit l’élu.
Et les choses sérieuses vont commencer le 19 décembre prochain à l’Île de loisirs, avec la pose du premier rail, en présence du ministre des Transports, Clément Beaune. Pour le territoire de Saint-Quentin-en-Yvelines, ce test grandeur nature répond à un double objectif. D’une part avec Urbanloop « pour avoir un retour d’expérience sur un premier déploiement en conditions réelles de plus grande envergure que le petit démonstrateur de Nancy. C’est une solution innovante, durable et unique en son genre, avec un faible coût carbone, une certaine vitesse, etc., estime Jean-Baptiste Hamonic. Nous avions fait un benchmark pour les JO et la vitrine sur la partie mobilité et nous avions repéré Urbanloop avec un projet sérieux. Une expérimentation de 17 mois qui pourra être raccourcie ou prolongée, sans idée de déploiement à plus grande échelle à SQY. On tirera le bilan d’abord. »
Un test grandeur nature
Pour Urbanloop, ce retour d’expérience sera aussi profitable pour améliorer le système et répondre à la commande de la métropole du Grand Nancy, pour 2026, avec la création d’une boucle Urbanloop de 7 km pour connecter en un temps record un parking relais à son centre-ville. Et d’autre part, concernant le deuxième objectif, il s’agit d’un « dispositif qui va compléter l’offre de transport au moment des jeux olympiques et paralympiques avec cette desserte interne de l’Île de loisirs. Le temps de trajet sera de 90 secondes à peu près », précise l’élu aux transports de Saint-Quentin-en-Yvelines.
Autre avantage, et non des moindres, de la solution Urbanloop, c’est son faible encombrement au regard des autres modes de transport en commun. En surface, en souterrain et parfois en aérien, les capsules de l’Urbanloop circulent sur des rails électrifiés (très basse tension), sans batterie. Ces capsules ont été conçues pour pouvoir accueillir deux personnes et parcourir la distance d’un kilomètre en une minute, avec un rejet très faible en carbone. « Sans oublier le volet installation qui est particulièrement important, assure Jean-Baptiste Hamonic. On est réellement sur une emprise au sol qui ne dénature pas le beau site de l’Île de loisirs. Toutes les installations sont réversibles et les rails ont une emprise faible. Cela nous évite également de créer des infrastructures lourdes et de faire des aménagements trop conséquents. »
Les travaux ont été lancés. Il reste le raccordement électrique qui doit être fait par la société Enedis. Des barrières de sécurité vont également être posées tout le long du trajet pour éviter les accidents. La construction de la station au relais des Canardières et au parking de l’Île de loisirs pourra également commencer d’ici peu. Une fois tous les rails du parcours posés, le trajet représentera une distance de 2 km.
Desservir la fan zone durant les Jeux olympiques et paralympiques de 2024
Les premières capsules gratuites devraient circuler à la fin du printemps 2024, quelques semaines avant les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et elles vont permettre de desservir la fan zone sur l’Île de loisirs. Dix capsules circuleront entre ces deux stations avec une vitesse de pointe de 50 km/h. Une fois installé, l’usager n’a plus qu’à appuyer sur le bouton de sa destination pour partir, comme dans un ascenseur. Ces petits véhicules autonomes pilotés par des algorithmes d’intelligence artificielle permettent un voyage sécurisé, sans arrêt, sans correspondance. La ligne sera ensuite exploitée durant un peu plus d’un an par Keolis pour recueillir les avis et les expériences utilisateurs des Saint-Quentinois.
Pourtant, innover ne semble pas toujours simple, même quand les projets sont portés en partie par des collectivités territoriales ou des organismes intercommunaux, en partenariat avec des entreprises privées. « Nous avons passé avec les services toutes les étapes administratives et techniques avec le dossier préliminaire de sécurité DFP, le dossier d’autorisation des essais, le fameux DAE, les allers et retours avec toutes les émanations très utiles néanmoins de l’État, souligne Jean-Baptiste Hamonic. Cela nous a montré qu’il est de plus en plus difficile dans ce pays de porter des projets innovants qui cochent toutes les cases avec un certain nombre de normes qui s’imposent à nous. Nous avons eu le feu vert de tout le monde et cela fait sens. C’est dans l’intérêt des voyageurs : qualitatif et rapide et sobre en énergie et porté par une entreprise française. »
Et l’élu aux transports de Saint-Quentin-en-Yvelines précise également qu’Urbanloop « a aussi connu des hauts et des bas, des tentations de ne pas aller au bout du projet ». « Un parcours du combattant pour les services sur les autorisations diverses et variées même si nous avions un appui national, ce n’était pas gagné », ajoute-t-il.
Et le projet Urbanloop revêt d’autant plus de signification pour l’élu saint-quentinois qu’il entre en « résonance avec les travaux qui sont aujourd’hui portés au niveau de l’État dans la stratégie nationale bas carbone, la future loi de programmation de l‘énergie qui arrivera l’année prochaine et tous ces travaux plus spécifiques dans le domaine des transports qui permettent de prendre réellement le pouls de la transition énergétique et écologique parce que c’est là que l’on voit les avancées », souligne Jean-Baptiste Hamonic.
« Alors, être dans ce groupe de travail consacré à l’énergie au sein du ministère des Transports, évidemment, c’est très intéressant, et le ministre voit d’un très bon œil que nous portions ce type de projet comme Urbanloop, poursuit le maire de Villepreux. Après, ce qui va être intéressant aussi pour nous, dans cette expérimentation, c’est de voir quelle acceptabilité sociale il aura, avec sa sobriété financière (aménagement, infrastructure, etc.). Cela nous permet de passer des paroles et des grands objectifs chiffrés au niveau national aux actes. »
De son côté, l’agglomération de Saint-Quentin ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, et d’autres projets sont d’ores et déjà dans les tuyaux, comme le reconnaît Jean-Baptiste Hamonic. « Nous avons des choses embryonnaires avec des écoles, des entreprises, notamment sur les PDIE (Plan de déplacement inter-entreprises, Ndlr) et avec le Club climat énergie. Avec IDF Mobilités, nous aimerions pousser l’expérimentation des véhicules autonomes dans le cadre de certaines lignes de bus DSP (Délégation de service public, Ndlr). C’est à l’étude et nous espérons avancer rapidement sur ces sujets. »
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