Connais ton CO2. C’est le nom du jeu inventé par Philippe Kerignard. Cet Ignymontain a eu l’idée il y a deux ans de concevoir un jeu de cartes pour informer les gens sur l’empreinte carbone de leurs activités et leur impact sur le réchauffement climatique. « Je jouais à un jeu de société avec mes filles, raconte l’homme de 55 ans, ingénieur en télécoms de formation et qui travaille dans l’innovation pour un géant des télécommunications. Je venais d’avoir une formation sur la fresque du numérique, […] où on vous explique les conséquences de l’achat d’un téléphone mobile, que par rebond et effet domino, il y a des machines qui extraient à l’autre bout du monde des métaux rares, et à la fin, on explique qu’un Français moyen consomme aujourd’hui entre 10 et 12 tonnes de C02 [par an], et qu’en 2050, suivant l’accord de Paris, il faudra arriver à 2 tonnes. »
« Suite à cette formation, je me suis dit ‘‘OK, mais moi, si j’achète un PC, c’est quoi’’ Je n’avais même pas l’ordre de grandeur, poursuit-il. C’est un peu comme si on va dans un pays étranger et qu’on nous dit ‘‘La chambre d’hôtel, c’est 3 442 quelque chose (la monnaie du pays, Ndlr), mais c’est quoi en euros ?’’ […] J’avais cherché les valeurs de plein de choses pour me faire mon échelle à moi. Je me suis dit : ‘‘Pourquoi, le travail que j’ai fait à titre personnel, ne pas en faire profiter tout le monde, et les gens n’auront pas besoin de chercher’’. » L’idée étant de « le faire sous forme de jeu, et que ce ne soit pas quelque chose de punitif, de donneur de leçons, ajoute Philippe Kerignard. Là, les gens jouent, font ce qu’ils veulent, mais au moins ils ont l’information ».
Ainsi est né Connais ton CO2, jeu de 98 cartes, réparties en trois catégories : objets du quotidien (fabrication et consommation), production alimentaire et énergie. Chacune de ces cartes possède une face question et une face réponse. Parmi elles, la consommation d’un repas, la fabrication d’un ordinateur portable, d’un ballon de foot, un repas avec du bœuf, un trajet aller-retour en avion Paris-San Francisco, ou encore la production d’une centrale à fioul.
Chaque joueur reçoit six cartes, posées côté question sur le plateau, et la dernière est positionnée au milieu du jeu côté réponse. Le joueur doit alors jouer une carte et la poser à gauche de la carte du milieu, s’il pense que l’impact en kilogrammes équivalents de dioxyde de carbone de sa carte est inférieur, ou à droite s’il pense qu’il est supérieur. Il retourne ensuite la carte posée côté réponse. S’il a vu juste, la carte reste là où elle a été posée. Dans le cas contraire, le joueur remet la carte dans la pioche et pioche une autre carte. Le premier à se défausser de toutes ses cartes remporte la partie. Les chiffres indiqués sur les cartes concernant les impacts carbone proviennent de sources officielles, comme l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Chaque carte mentionne le site internet du jeu, connaistonco2.com, celui-ci énumérant ensuite chacune des cartes et indiquant les liens vers leurs sources.
Philippe Kerignard a par ailleurs souhaité que son jeu soit éco-conçu. « Le rapport hauteur-largeur [des cartes] a été calculé pour qu’il y ait un minimum de chutes lors de la découpe, et il n’y a pas de coins ronds car [cela nécessite] une machine supplémentaire », souligne-t-il. Une production responsable et en circuit court. Les cartes ont été imprimées par une entreprise située d’abord à Trappes puis à Buc. « J’aurais pu le faire faire en Chine ou au Portugal, c’était à moitié prix, mais ce n’était pas l’objectif », glisse Philippe Kerignard, qui au départ a consacré « six mois », à raison « de deux ou trois heures le soir » à la création des textes et visuels des cartes.
Le jeu est vendu 13 euros. Philippe Kerignard en a commercialisé un peu plus de 1 000 depuis le lancement de la commercialisation, en juin 2021. Ses clients sont principalement des résidents de Montigny-le-Bretonneux, chez qui il les dépose (il peut aussi les livrer par La Poste), mais surtout des CE d’entreprises. « 99 %, c’est du CE », indique-t-il, révélant avoir eu des retours aussi positifs que curieux, parfois. « Il y a un de mes collaborateurs qui m’a dit ‘‘Je ne prends plus l’avion, je ne partirai plus en vacances loin’’ », confie-t-il. Lui ne se montre pas aussi radical dans son mode de vie, mais tente d’adopter certains principes chez lui avec son épouse. « Sur le plastique, on a fait beaucoup d’efforts. On a pas mal de chose où il n’y a plus de plastique ou d’emballage. Sur la partie eau, on fait aussi très attention, affirme-t-il. L’achat de ma voiture a précédé ma conscience écologique, mais je réfléchis à prendre une hybride. »