Une semaine après les Mondiaux de cyclisme sur piste, le Vélodrome national accueillait, du 20 au 23 octobre, les Mondiaux de paracyclisme sur piste. Environ 190 coureurs handisport, venus de 38 pays (record du nombre de délégations battu pour des Mondiaux de paracyclisme sur piste) se sont affrontés sur l’anneau saint-quentinois. Avec un parfum d’olympisme puisque cette même piste accueillera les épreuves de cyclisme sur piste des Jeux paralympiques dans moins de deux ans. C’était aussi les premiers Mondiaux de paracyclisme sur piste à SQY et les premiers en France depuis 2007.

Les Français terminent à la 3e place du classement des médailles, derrière la Grande-Bretagne et l’Australie. Le même rang que leurs homologues ‘‘valides’’, mais avec beaucoup plus de breloques. 17 médailles ont été remportées par la France, alors que « l’objectif était 15 », se félicite Adrien Balduzzi, directeur marketing et événementiel de la Fédération française handisport, qui organisait l’événement en collaboration avec l’UCI. Parmi elles, 6 médailles d’or, dont 4 pour le seul Alexandre Léauté. Déjà titré aux jeux de Tokyo, le jeune homme de 22 ans, hémiplégique suite à un AVC à la naissance qui l’a paralysé de quasiment tout le côté droit de son corps, est l’un des hommes forts de ces Mondiaux. Il a triomphé en omnium (avec record du monde), en kilomètre, en poursuite et en scratch, en catégorie C2.

Les deux autres médailles d’or du clan tricolore ont été apportées par Dorian Foulon. Le coureur de 24 ans, lui aussi champion paralympique à Tokyo, a remporté la poursuite et l’omnium, en catégorie C5, réservée aux personnes victimes d’amputation ou d’atteinte unilatérale de membres supérieurs.

Ces deux athlètes faisaient partie des têtes d’affiche de la délégation tricolore, pour qui une médaille, voire la plus belle, était attendue. Mais ces Mondiaux ont aussi réservé de belles surprises. Comme pour Christelle Ribault. À 44 ans, celle qui disputait ses troisièmes championnats du monde et a perdu l’usage de sa jambe gauche en 2017, s’est classée 3e du scratch dans sa catégorie. Sa première médaille internationale. « C’est du bronze, mais pour moi, ça vaut vraiment de l’or, a-t-elle réagi, elle qui connaît bien ce vélodrome. C’est une belle récompense, surtout chez moi, devant ma famille, mes amis, sur le lieu où je coache, où je travaille. »

Record de participation et d’affluence malgré des tribunes vides

Le directeur marketing et événementiel de la Fédération française handisport met d’ailleurs en avant le bilan sportif de ces Mondiaux, par ailleurs qualificatifs pour Paris 2024. « On a organisé cet événement car, à Tokyo, on avait souffert de pas avoir assez de quotas pour amener l’ensemble des athlètes qui avaient les minimas. On ne voulait pas tomber dans les mêmes travers, donc on a vu avec l’UCI pour que ce soit le premier événement qualificatif pour Paris 2024. Donc il fallait que nos têtes d’affiche brillent, ce qu’elles ont magnifiquement réalisé, juge Adrien Balduzzi. Et puis, il y a les petites satisfactions qui n’étaient pas prévues, comme Christelle Ribault, […] il y a deux ou trois jeunes qui ont fait les 4e, 5e et 6e place qu’on n’attendait pas. C’est plutôt la génération 2028, et ça leur permet d’accélérer et de potentiellement se qualifier pour Paris 2024. »

Et de poursuivre au sujet de la moisson française : « Si vous faites la même performance aux Jeux, juste le cyclisme – route mais aussi piste –, […] rien que le cyclisme handisport peut représenter aux Jeux paralympiques quasiment 38 médailles […], ce qui est plus que le total de tous les sports confondus des derniers Jeux de Tokyo. Après, sur des Mondiaux, il y a plus de disciplines que sur les Jeux, il y aura moins de médailles sur les Jeux, mais si on rationalise tout ça, la performance qu’ils ont réalisée là est magnifique et on est sur une phase de progression monumentale. »

De bon augure donc pour Paris 2024. Même si, pour d’autres, c’est davantage un sentiment de revanche qui dominera lors des paralympiades s’ils s’y qualifient. Raphaël Beaugillet a terminé deux fois 4e en tandem avec son pilote Quentin Caleyron, sur le kilomètre et la vitesse. « Nos championnats se résument à ça, soupire, très déçu, le premier cité, malvoyant, en montrant son dossard 4. C’est la pire place sur un championnat. » Quentin Caleyron semblait lui encore plus abattu. « On a montré de belles choses en qualifications, et malheureusement, ça ne fonctionne pas en finale », réagissait-il le 23 octobre après la vitesse.

Quentin Caleyron, le local de l’étape, ex-pistard ‘‘valide’’ de l’équipe de France licencié au VCESQY-team Voussert, le club local, s’est tourné depuis un peu moins d’un an vers un projet handisport, après le départ de François Pervis, l’ex-pilote de Raphaël Beaugillet et septuple champion du monde chez les ‘‘valides’’. « Il m’avait déjà contacté avant les Jeux [de Tokyo] car il savait que François allait arrêter après, raconte-t-il. Donc il cherchait un pilote. Moi, j’étais encore engagé avec l’équipe de France, mais, en septembre, j’ai rappelé Raph pour lui dire que ça m’intéressait. C’était vraiment un projet qui me tenait à cœur et que j’avais envie de découvrir ».

Il nourrit d’ailleurs de très grandes ambitions pour Paris 2024 : « C’est encore un tandem jeune, les autres équipes sont plus expérimentées, il y a en a ça fait presque 8 ans et deux paralympiades qu’ils sont ensemble. C’est dur de rivaliser en si peu des temps, mais on est déjà dans le match, la preuve, on termine deux fois 4e. […] On a la chance d’avoir pu commencer à rouler ensemble trois ans avant les Jeux, donc ça va payer. »

En matière d’affluence, le contraste était saisissant avec les Mondiaux une semaine plus tôt devant un vélodrome plein à craquer le week-end. Ces championnats de paracyclisme se sont eux disputés devant des tribunes paraissant quasi vides. Mais l’engouement est en progression selon Adrien Balduzzi, évoquant un chiffre de « 2 000 personnes environ par jour en moyenne » en cumulé sur une journée, soit un « record d’affluence ». « Pour avoir une comparaison, les derniers championnats du monde au Canada, il y avait 200 spectateurs par jour, rappelle-t-il. On est sur une phase très ascendante, à Paris ce sera plein et à nous de conserver le succès de Paris 2024 pour garder ces salles pleines après sur les événements en France. »