« On a des comportements très variables et une croyance très hétérogène sur le risque de se faire mordre [par une tique] et sur la sévérité de la maladie de Lyme », commente Marc Leandri, maître de conférences en sciences économiques à l’UVSQ et à Paris-Saclay. C’est la première conclusion qu’il tire des résultats rendus par l’enquête sur le comportement et les perceptions des usagers des forêts vis-à-vis des tiques et de la maladie de Lyme. « Ça aide à comprendre le problème de santé publique », poursuit-il.
Dans un pays comme la France, la maladie de Lyme est justement peu connue du grand public. D’autant plus qu’en raison du réchauffement climatique, la population des tiques augmenterait dans certaines régions, comme en Île-de-France – bien qu’elle reste moins touchée que la moyenne nationale – selon le maître de conférence, d’où cette diversité dans les résultats. Les habitants ne seraient pas tous suffisamment informés.
Par exemple, certaines personnes se protégeraient des tiques en forêt et connaîtraient les différents symptômes de la maladie, alors que d’autres ne se protégeraient pas et penseraient que la maladie n’est pas grave. « Cette forte hétérogénéité rend plus complexe la mise en place d’instruments d’information », en conclut le maître de conférences.
Lancée fin septembre, début octobre, cette enquête, s’inscrivant dans un projet de recherche interdisciplinaire porté par le laboratoire Cemotev de l’UFR de sciences sociales de l’UVSQ et de l’université Paris-Saclay, vise justement à sensibiliser davantage les usagers des forêts pour in fine proposer des moyens de communication, afin de lutter contre les risques de morsures et d’infections.
Les résultats étant récents, ils sont à prendre, pour le moment, avec des pincettes. « L’échantillon de 1 200 réponses avec un bon taux de remplissage […] demande un recalibrage. On a des catégories surreprésentées et d’autres sous-représentées », nuance Marc Leandri, bien que les résultats donnent déjà une tendance qui vérifie l’hypothèse du maître de conférences sur l’hétérogénéité des réponses.
Pour l’instant, ce sont les 46-65 ans qui ont le plus répondu à l’enquête, soit 45 % des réponses contre 35 % pour les 25-45 ans et 9 % pour les 18-25 ans, selon le premier jet de réponse de l’enquête.
Et dans les Yvelines, le niveau de sensibilisation aux tiques et à la maladie serait pour le moment inférieur à la moyenne de l’échantillon national. Les usagers des forêts interrogés ont en moyenne un niveau de protection inférieur de 30 %. Ils ont une connaissance des tiques inférieure d’environ 20 % et une connaissance de la maladie de Lyme inférieure de 20 %, par rapport à la moyenne de l’échantillon national, selon les chiffres « très préliminaires » de l’enquête.
Celle-ci pose également des questions sur le mode de communication le plus efficace. Pour le moment, et au vu des réponses, l’affichage dans les espaces boisés, l’information dans les médias et sur les réseaux sociaux ressortent le plus. Une meilleure qualité statistique est espérée à la fin de l’hiver, avec un échantillon oscillant entre 1 000 et 1 500 réponses.
Pour autant, cette maladie reste difficile à prévenir et à faire connaître au vu de ses symptômes très aléatoires et hétérogènes. « On n’est pas capables de dire aux gens : ‘‘ Vous exagérez ou pas [dans la perception et la protection] ’’, car la maladie de Lyme, ce sont des symptômes très variables d’une personne à une autre. Ça peut être une légère fièvre, des courbatures, ou une infection chronique, des problèmes neurologiques… », illustre le maître de conférences. Selon lui, les instruments de prévention doivent prendre en compte cette hétérogénéité, en plus de celle des croyances des usagers sur l’infection.
C’est pourquoi, une autre enquête va être lancée d’ici deux semaines auprès des experts médicaux sur la maladie, « comme les symptômes sont […] peu traités en France, justifie-
t-il. On va comparer la perception de la population générale avec la perception des experts médicaux. » L’équipe de recherche souhaite en effet savoir si les médecins sont inquiets, si les risques sont surestimés, etc. Le questionnaire est en train d’être finalisé et ce serait une première en France, selon Marc Leandri. Les données devraient être traitées d’ici février.