Coignières sera la ville d’accueil du championnat scolaire académique d’échecs le 23 mars prochain. C’est ce qu’ont appris les élèves de CM2 à l’école Marcel Pagnol, le 21 octobre, alors qu’ils étaient en plein atelier d’échecs. « C’est une nouvelle extraordinaire », s’exclame dans la classe Claude Chéron, l’animateur du cours, avant d’ajouter : « On aura contre nous les champions de France sortants ». « Il ne faudra pas perdre à domicile », enchaîne alors un des élèves. Sachant qu’avant cela, ils vont participer au championnat départemental d’échecs des écoles, le 26 janvier prochain aux Bréviaires.
« La démocratisation culturelle »
Alors stressés ou excités, ces enfants ont commencé les ateliers d’échecs il y a bientôt un an. À la fois à l’école élémentaire Marcel Pagnol et Gabriel Bouvet, les classes de CP, CE1, CE2, CM1, et CM2 ont le droit à 12 ateliers chacune tout au long de l’année, animés par le joueur et animateur diplômé de la fédération française des échecs, Claude Chéron. Sachant qu’en maternelle aussi les élèves s’initient au jeu des échecs avec leurs enseignants.
Pour ce faire, la municipalité a donc mis à la disposition de chaque école 15 jeux individuels, un échiquier mural magnétique pour l’animateur, et un jeu d’échecs géants, « pour une pratique régulière dans les cours de récréation », informe Sonia Parour, responsable du développement culturel à Coignières.
Ces ateliers s’inscrivent dans une politique plus globale qui est la promotion de la culture, une des priorités du mandat de Didier Fischer (DVG), maire de Coignières. « L’accès à la culture n’est pas évident et on a encore beaucoup à faire dans la démocratisation culturelle. On a des équipements, mais ça ne suffit pas. Il faut des actions », affirme le maire.
D’où le lancement de ces ateliers, et les bénéfices sont non négligeables. « J’ai été surpris par la manière dont les enfants se sont emparés de ça et les enseignants ont aussi été surpris de voir comment les écoliers en difficulté dans un cadre classique se révèlent dans les tournois d’échecs », constate Didier Fischer.
C’est notamment le cas de Victor, l’espoir de cette classe de CM2 à Marcel Pagnol. Doté d’énormes capacités intellectuelles, il était plus en retrait en classe. Mais la découverte des échecs l’a révélé auprès de ses camarades, raconte Sonia Parour. « Ce n’est plus le même enfant », rapporte-t-elle. D’ailleurs, Claude Chéron compte sur lui pour former les autres enfants. « C’est un moteur dans cette classe », affirme-t-il fièrement.
Pendant l’atelier, Victor est d’ailleurs souvent sollicité par l’animateur pour montrer aux écoliers les stratégies possibles pour coincer le roi et faire « échec et mat ». « Il faut priver le roi de ses libertés. Il ne faut pas faire tout le temps »échec ». Ça ne sert à rien. […] Il faut le priver de cases », explique Claude Chéron.
Victor prend son rôle très à cœur. Au moment où la leçon se finit, les élèves ont le droit de s’exercer en jouant entre eux avec les échiquiers mis à disposition. Ils sont alors mis en condition de championnat. Victor joue avec un de ses camarades. « En fonction de ce que Claude dit, dès qu’il y a une erreur, je lui dis de refaire le coup et je lui explique », explique-t-il, après avoir quand même gagné la partie.
« Ils sont plus concentrés et plus autonomes. »
Les bénéfices de ces ateliers sont d’ailleurs multiples. « Ça développe des compétences transversales. […] La réflexion, l’anticipation, la mémorisation, la stratégie, mais aussi les relations psychosociales et le tutorat. Les enfants se retrouvent dans des activités communes et ça favorise l’intérêt commun », observe la directrice de l’établissement, Camille Paillargue.
Les échecs seraient même un plus pour les élèves initiés en primaire et arrivant en sixième. « Ceux qui ont joué en scolaire ont un avantage en rentrant au collège, car ils apprennent à réfléchir et à résoudre des problèmes », témoigne Claude Chéron.
D’ailleurs dans cette classe de CM2, certains écoliers reconnaissent avoir un peu changé depuis leur pratique des échecs.
« Je suis devenu plus calme à la maison », témoigne un des enfants. D’autres élèves partageront le même avis. Une autre élève expliquera même mieux travailler et mémoriser plus facilement depuis.
Néanmoins, le calme dans la classe ne serait pas encore complètement acquis grâce au jeu d’échecs. « Ils sont plus concentrés et plus autonomes. […] J’espère un effet calmant, mais c’est encore tôt pour le dire », observe la directrice de l’établissement. L’enseignante des CM2, Clémentine Pereira le confirme : « Ils ont beaucoup de mal à faire le silence. Mais les échecs les obligent à se concentrer sur une longue période et à ne pas penser à autre chose ou passer d’une chose à l’autre. »
Le calme sera justement de rigueur lors de leur futur championnat en janvier 2022. Claude Chéron souhaite même poursuivre les entraînements les midis. Les élèves, eux, sont déjà stressés. « Quand on va rentrer dans la salle, ça sera comme pour le bac », lance Azer dans sa classe. Mais l’un de ses camarades le rassure : « Ce qui compte, c’est de participer et de jouer ».
Des ateliers philosophiques dès la primaire
Tout comme les ateliers d’échecs, Coignières a encouragé l’année dernière la mise en place d’ateliers philosophiques avec l’association Savoir être et vivre ensemble (Seve) dans ses écoles maternelles et élémentaires. Ils se poursuivent cette année scolaire, dès la rentrée des vacances de la Toussaint, sur deux cycles de 12 ateliers dans deux classes. L’objectif étant d’aider les enfants à penser par eux-mêmes.
Pendant ces moments d’échange animés par un éducateur formé, « ils [les écoliers] peuvent s’exprimer librement sur des questions universelles, élaborer des réflexions critiques dans le cadre d’une interaction sociale, donner du sens aux contenus scolaires, aux sujets sociétaux, […] en respectant la parole de l’autre », explique Sonia Parour, la responsable du développement culturel à Coignières. Ils abordent par exemple des sujets tels que la mort, l’amitié, la liberté, le respect des différences entre garçons et filles.
Et ces ateliers seraient plus que bénéfiques en cette période de pandémie, selon la directrice de l’école Marcel Pagnol, Camille Paillargue. « On est dans un besoin. Suite au confinement, les rapports entre enfants se sont dégradés. Ils ont perdu les règles [de vie] en société, comme la tolérance… Ce sont des valeurs qu’il faut réapprendre »,
témoigne-t-elle, en observant tout de même plus de sérénité dans les classes.