Le 7e art reprend ses droits à Saint-Quentin-en-Yvelines comme dans tout le pays. Depuis le 22 juin, les cinémas, fermés depuis le 15 mars en raison du Covid-19, sont autorisés à rouvrir. Un soulagement pour les adeptes des salles obscures et les professionnels du secteur, à l’arrêt depuis plus de trois mois.
Cette réouverture devra bien sûr répondre aux directives du guide sanitaire édité par la Fédération nationale des cinémas français. « L’objectif […] est de donner aux salles de cinéma les instruments nécessaires pour pouvoir reprendre leur activité tout en respectant les indications établies par les autorités de santé, pour une durée qui sera estimée nécessaire, peut-on notamment y lire. Ces instruments pourront être revus en fonction de l’évolution de la situation sanitaire. »
À SQY, il existe cinq cinémas, qui s’attachent à appliquer ces grands principes érigés au niveau national : l’espace Philippe Noiret aux Clayes-sous-Bois, le Ciné 7 à Élancourt, la salle Jacques Brel à Montigny-le-Bretonneux, le Grenier à sel à Trappes et le Ciné cité SQY Ouest, à Montigny-le-Bretonneux. Ce dernier, grand complexe de 16 salles du groupe UGC et implanté au sein du centre commercial SQY Ouest – alors que les autres cinémas saint-quentinois sont de plus petites structures indépendantes -, a rouvert ce lundi en mettant en œuvre deux principaux types de dispositifs sanitaires : ceux « à l’intention des clients » et ceux « pour les salariés », évoque le directeur du cinéma, Marc-Alban Gravez.
Les clients disposent ainsi de bornes de gel hydroalcoolique dans les différents points du cinéma. Au niveau de chaque point de vente, un marquage au sol a été placé pour faire respecter les principes de distanciation physique, qui sont également rappelés sur des kakemonos et projetés sur les écrans des salles. Si les caisses sont ouvertes, la réservation par internet est gratuite et encouragée pour éviter les contacts. Les spectateurs ont « juste à présenter leur smartphone directement avec leur QR code et le billet sortira directement », précise Marc-Alban Gravez.
Quant aux salles, leurs capacités habituelles, allant de 150 à 500 places, sont réduites de moitié afin, là encore, de respecter les distanciations. Au moins un siège doit être laissé entre chaque groupe de personnes. Pour éviter les points de contact, les portes des salles sont ouvertes avant la séance, et une demi-heure est laissée entre chaque séance d’une même salle, contre une dizaine de minutes en temps normal.
La cinquantaine de salariés du cinéma sont eux chacun munis d’un masque et de gel hydroalcoolique personnel, et pour ceux qui sont en contact avec le client, en caisse ou à la confiserie, des plexis supplémentaires ont été installés. Enfin, les agents des points de contrôle ont une visière, en plus du masque. Masque qui n’est en revanche pas obligatoire pour le public, conformément au protocole national, mais « fortement conseillé », souligne le directeur.
Il en va de même pour le Ciné 7, à Élancourt. Ce cinéma indépendant est géré en Société d’économie mixte (Sem), c’est-à-dire à la fois avec des fonds publics et privés. Rouvert lui aussi depuis le 22 juin, l’établissement n’impose donc pas le port du masque mais le recommande fortement. Et veille là aussi au respect de la distanciation avec des capacités réduites de moitié pour les trois salles, une distance physique d’au moins un mètre entre chaque spectateur, ou encore la projection de consignes sanitaires avant et après chaque séance.
Des séances espacées de 30 minutes. « Par exemple, la première séance devrait démarrer à 14 h dans une salle, à 14 h 30 dans l’autre salle, et à 15 h dans l’autre, détaille Luc Beaucamp, directeur du cinéma. à la fin de chaque séance, [….] on a un renouvellement d’air avec de l’air extérieur. » Un sens de circulation est aussi mis en place pour limiter les croisements entre personnes. En revanche, pas de réservations en ligne, mais du gel est disponible « devant chaque porte de salle et aux entrées du cinéma », mentionne-t-il. Avant chaque séance, un membre de l’équipe viendra dans la salle s’assurer que tout va bien.
À l’espace Philippe Noiret, cinéma municipal des Clayes-sous-Bois, les premiers spectateurs post-Covid ont aussi été accueillis ce lundi. Le port du masque est obligatoire « pour l’accès au cinéma », mais « pendant la séance, ça va être difficile de contrôler que les gens n’enlèvent pas leur masque », reconnaît-on du côté de la Ville, qui ajoute que, parmi les dispositions prises, on trouve de nouveaux horaires de séance et d’ouverture, une circulation en sens unique, et la différenciation de la circulation entre les deux salles de l’équipement.
Au final, parmi les cinémas saint-quentinois, un seul se montre assez ferme sur le masque : le Grenier à sel, à Trappes, où le port du masque sera obligatoire. Un arrêté municipal a même été passé en ce sens. Sera, car le cinéma ne rouvre que le 30 juin à 20 h 45, avec la projection de Voir le jour, film sur le milieu médical.
« On était dans l’incertitude de beaucoup de films. […] On s’attendait à [pouvoir] rouvrir début juillet. […] On a été un peu pris de court, les distributeurs les premiers, il a fallu redater leurs films, faire revenir tout le monde de télétravail, donc ça s’est fait un peu dans la précipitation. Il y a beaucoup de gens qui ne sont pas prêts, donc […] on n’est plus à une semaine près », explique Gaël Pineau, responsable du Grenier à sel.
Pour le reste, dispositif sanitaire classique pour le cinéma trappiste, notamment mise à disposition de gel et vente à distance encouragée, mais vente sur place possible avec possibilité de paiement sans contact dès le premier euro. Par ailleurs, l’accueil est nettoyé après chaque séance, et la capacité d’accueil de la salle passe de 203 à 101 places. Autre cinéma municipal de SQY, la salle Jacques Brel, à Montigny-le-Bretonneux. Là non plus, la réouverture n’est « pas prévue pour [l]e mois de juin », informe la commune.
Mais pour d’autres, il était urgent de rouvrir. « Aujourd’hui[…], il faut se focaliser sur la reprise, insiste Marc-Alban Gravez. Il sera temps de faire des calculs (sur les pertes économiques, Ndlr), de chiffrer tout ça, on est focalisés sur notre volonté d’ouverture, [le fait] de retrouver nos clients et de mettre en place un protocole assez lourd. »
Les calculs, certains les ont faits. Le Ciné 7 déplore ainsi « 150 000 euros de pertes de chiffre d’affaires sur les trois mois », selon Luc Beaucamp. Le cinéma élancourtois a, outre le chômage partiel pour ses six salariés, bénéficié d’un dégrèvement de « la totalité du loyer pendant la période de fermeture » d’après le président de la Sem Ciné 7 et adjoint à la culture à Élancourt, Laurent Mazaury (UDI), qui ajoute que l’établissement a aussi contracté un « prêt garanti par le gouvernement, [qui] représente 25 % du chiffre d’affaires annuel ». Il avoue néanmoins qu’avec « les mêmes coûts fixes et une jauge à 50 % », la situation « ne peut pas durer […] si les collectivités ne viennent pas en renfort ».
À l’UGC de SQY Ouest, Marc-Alban Gravez estime « difficiles à chiffrer » les conséquences économiques des derniers mois. Mais il évoque des « pertes que naturellement nous avons eues ». Au Grenier à sel, Gaël Pineau ne souhaite pas communiquer de chiffres, tout en mentionnant « des difficultés financières », mais assure que le cinéma a « décidé de rattraper le temps perdu et d’ouvrir tout l’été », alors qu’ « habituellement, nous fermons trois semaines dans le creux de l’été ». Un été qui risque d’être « un peu tristoune » selon lui, du fait de l’absence de gros blockbusters dont la sortie a été décalée. Luc Beaucamp mentionne lui « quelques blockbusters fin juillet, comme Tenet (le dernier Christopher Nolan, Ndlr) ou Mulan » mais abonde sur le fait que « l’été risque d’être assez calme ».
Concernant cette semaine de reprise, ce sont surtout, hormis quelques nouveautés, des films déjà à l’affiche en mars qui sont programmés, comme De Gaulle ou La bonne épouse. Mais le public sera-t-il au rendez-vous ? Outre les mesures sanitaires, les cinémas prennent ainsi d’autres dispositions pour inciter leur clientèle à revenir. Le Grenier à sel a notamment décidé de prolonger de six mois ses cartes d’abonnement de dix places et mise sur la fidélité de ses spectateurs. Idem au Ciné 7, où l’on se montre optimiste sur le fait que l’appétence pour le local qui s’est développée pendant la crise se retrouvera chez eux.
« On nous a répété pendant trois mois que les gens changeaient de prisme, retournaient vers le local, les circuits courts, constate Luc Beaucamp. Est-ce que ça va être le cas [aussi pour le cinéma] ? Je le souhaite […]. Les gens vont revenir dans les salles de proximité qui se trouvent au pied de leurs immeubles. »
À SQY Ouest, on essaie de jongler entre sécurité sanitaire et opérations cinématographiques originales. En attendant l’avant-première de Tout simplement noir le 12 juillet avec l’équipe du film, l’UGC reprogramme ainsi jusqu’au 30 juin ses « incontournables » de 2019 (Joker, Green book, …) à 3,50 euros la séance, et ses plus grands succès de tous les temps (tels que Bohemian Rhapsody, Kirikou, …) avec « Un jour, un film », à 5 euros la séance.
« On essaie de tout mettre en œuvre pour permettre aux gens de revenir en toute sécurité, assure Marc-Alban Gravez. Maintenant, c’est à nous de leur donner envie avec des films, en exploitant, en animant nos complexes, pour leur dire ‘‘Venez nous voir, nous on s’occupe de tout ce qu’il faut d’un point de vue sanitaire pour que vous soyez rassurés et que vous passiez un bon moment’’. »