Le déconfinement est lancé. Depuis ce mardi 12 mai, les premières écoles élémentaires et maternelles accueillent à nouveau des élèves. Comme dans tout le pays, les communes de Saint-Quentin-en-Yvelines se sont préparées les jours précédents ces réouvertures, dont les dates varient selon les villes. Même si début mai, 391 maires d’Île-de-France, dont quatre saint-quentinois, ont demandé dans une tribune le report de la réouverture. Le SNUIPP des Yvelines, syndicat d’enseignants du primaire, jugeait de son côté qu’une réouverture cette semaine était « irresponsable ».

C’est le 28 avril que le premier ministre avait annoncé une réouverture « progressive à partir du 11 mai » des écoles maternelles et élémentaires « sur la base du volontariat, sur l’ensemble du territoire ». Quelques jours plus tard, le ministère de l’éducation a rendu public son « guide relatif à la réouverture et au fonctionnement des écoles maternelles et élémentaires ». Long de 54 pages, il détaille les mesures à prendre sur les questions de lavage des mains, du port du masque, d’accueil des élèves, de circulation dans les écoles, de récréation, des activités, etc.

Mais au lendemain de la publication de ce document, 391 maires franciliens demandaient, dans un texte de l’Association des maires d’Île-de-France publié par La Tribune, de repousser la réouverture des écoles. Parmi les signataires de cette tribune figurent quatre maires de Saint-Quentin-en-Yvelines : Véronique Coté-Millard (UDI) des Clayes-sous-Bois, Jean-Michel Fourgous (LR) d’Élancourt, Nelly Dutu (PCF) de La Verrière et Jean-Luc Ourgaud (DVD) de Montigny-le-Bretonneux.

Les 391 signataires y demandaient « solennellement » au président de « repousser la date de réouverture des écoles s’agissant des départements classés rouges et en particulier de l’Île-de-France à une date ultérieure au 11 mai, qui permettra l’application stricte d’un protocole sanitaire tout aussi strict qui commence à peine à être diffusé aux villes ». Bien qu’en ordre de marche pour la réouverture, ils jugeaient le calendrier décidé par l’État « intenable et irréalisable » dans « la plupart » de leurs communes. La tribune demandait également « de ne pas faire reposer sur les maires la responsabilité juridique, politique et morale de la réouverture des écoles ».

Pour le SNUIPP, le syndicat d’enseignants du premier degré, la décision d’ouvrir les écoles à partir du 11 mai est jugée « irresponsable ». « Les collègues sont devant une tâche impossible à réaliser, estimait ainsi Bertrand Mesure, secrétaire départemental du syndicat, auprès du Parisien la semaine dernière. Les préconisations sont inapplicables avec des élèves si jeunes. Nous serons dans l’incapacité de travailler, les enfants seront isolés les uns des autres, dans l’impossibilité d’avoir le moindre contact, de partager le moindre jeu ou matériel, chacun parqué dans un espace hyper restreint… »

Toutes les écoles primaires et maternelles, sauf celles qui ont accueilli les enfants des personnels d’urgence, étaient fermées depuis le 16 mars en raison de l’épidémie de Covid-19.

La Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), par la voix de son référent départemental Mikaël Tane, estime quant à elle que malgré les annonces du gouvernement et de la direction académique, « les grands traits semblent encore assez flous ». « En effet, si on cloisonne tout jusque septembre prochain, ce sera sans doute encore plus difficile sans l’expérience de cette fin d’année. Cela dit, une ouverture aussi tôt nous a semblé assez précipitée, avance Mikaël Tane, soulignant que les conditions de reprises et les moyens différent d’une commune à une autre. […] Actuellement, les familles ne disposent pas des tenants et aboutissants pour faire le choix de remettre ou non leur enfant à l’école. »

Dans les faits, à Saint-Quentin-en-Yvelines, les écoles ont progressivement commencé à accueillir des élèves à partir du 12 mai, avec une pré-rentrée pour les professeurs la veille. Parmi les communes qui ont annoncé des ouvertures à cette date, figurent notamment Magny-les-Hameaux, Voisins-le-Bretonneux, Trappes, Villepreux ou encore Guyancourt.

La municipalité guyancourtoise table sur l’expérience acquise avec l’accueil pendant le confinement de plus de 35 enfants des personnels de santé et de sécurité. « L’idée est de continuer à accueillir ces publics prioritaires, auxquels s’ajoutent d’autres enfants, par exemple ceux de personnes travaillant à La Poste, des professeurs, etc. et charge à l’Éducation nationale d’aller compléter les groupes, résume le maire de Guyancourt, François Morton (DVG), favorable à la réouverture des écoles. Je suis moi-même enseignant, et je suis persuadé qu’un certain nombre d’enfants ont besoin de rentrer à l’école et de reprendre un rythme. »

D’après ses estimations, les parents de « 35-40 % des enfants » guyancourtois avaient fait part de leur souhait de remettre leurs bambins en classe, sachant que les groupes en maternelle seront limités à environ dix enfants et ne pourront excéder 15 enfants en élémentaire.

Mais plusieurs villes saint-quentinoises ont décidé de décaler cette rentrée de quelques jours pour des raisons d’organisation. Dans le journal municipal paru la semaine dernière, le maire d’Élancourt a ainsi jugé qu’il « ne serait pas raisonnable de rouvrir nos écoles dès le 11 mai : nous devons d’abord rôder nos méthodes, nos protocoles, pour assurer au maximum la sécurité sanitaire ». La municipalité a aussi sondé les parents élancourtois et « plus de 60 % d’entre eux n’ont pas l’intention de remettre leurs enfants en cours », selon Jean-Michel Fourgous. Un collectif d’enseignants lui aurait aussi demandé de ne pas rouvrir les écoles et de continuer la scolarisation à distance.

« C’est la raison pour laquelle, en accord avec l’Éducation nationale, nos écoles n’ouvriront leurs portes qu’à partir du jeudi 14 mai, et uniquement pour certains élèves », écrit Jean-Michel Fourgous, listant les enfants de soignants et de personnels prioritaires, les décrocheurs scolaires, et « selon le nombre de places disponibles » les « enfants dont les deux parents doivent impérativement reprendre le travail ». Aux Clayes-sous-Bois et à La Verrière, la réouverture doit également débuter le 14 mai.

Ce sera également le cas pour les élèves de Plaisir. « On avait dit dès le départ qu’on serait prêts pour accueillir les enseignants le 11 mai, pour que les enfants rentrent le 12 mai, rappelle Joséphine Kollmannsberger, maire LR de Plaisir. Sauf qu’après 35 réunions de concertation, on a constaté que les enseignants souhaitaient un peu plus de temps pour pouvoir aménager correctement leurs classes. »

L’édile précise en effet que la mairie s’occupe des aménagements à l’extérieur des écoles et devant celles-ci, et met à disposition le matériel pour les enseignants, mais que ce sont ces derniers qui font l’aménagement des classes et des couloirs. « On est sur le pont depuis presque deux semaines pour anticiper tout ça, c’est un travail énorme », souligne Joséphine Kollmannsberger, détaillant toutes les mesures telles que la désinfection totale des écoles deux fois par jour, l’achat de thermomètres lasers, l’organisation des entrées et de la cantine avec un service à table, la fourniture de visières au personnel communal, etc.

« On s’est donné pour objectif d’ouvrir toutes les écoles le 25 mai, [et] que toutes les familles inscrites sous forme de volontariat puissent être accueillies », explique le maire de Maurepas.

À Coignières, par contre, les groupes scolaires ne rouvriront que le 18 mai. « Ce délai supplémentaire a été validé afin de répondre à la demande des équipes éducatives pour permettre une réouverture pédagogique dans les meilleures conditions », indique la municipalité dans un communiqué. C’est également à partir du 18 mai que les écoles de Montigny-le-Bretonneux rouvriront.

Pour constater l’ampleur des mesures à prendre pour respecter le protocole, une visite dans une école suffit. La Gazette a par exemple pu accompagner le maire de Maurepas, Grégory Garestier (DVD), lors d’une visite de l’école de la Malmedonne, ce jeudi 7 mai. Cette dernière est la seule de la commune à être restée ouverte pendant toute la durée du confinement car elle a accueilli les enfants des personnels d’urgence, soit entre 15 et 20 enfants par jour.

Dans ce groupe scolaire, des flèches au sol indiquent le sens de circulation à suivre dans tout l’établissement, des marquages permettent de visualiser la distanciation physique à respecter, du gel hydroalcoolique est disponible pour le personnel, les tables sont espacées d’un mètre dans les classes, etc. « Ce sont des choses que nous allons devoir multiplier dans les 16 écoles », confirme Yannick Kerauffret, directeur du pôle famille à la mairie de Maurepas.

L’organisation a d’ailleurs été adaptée à partir de cette semaine dans l’école de la Malmedonne, qui en plus des enfants des personnels d’urgence, accueille maintenant des enfants d’enseignants et du personnel communal, soit une cinquantaine d’élèves au total. Ces derniers vont être répartis par groupe, qui entreront chacun par une entrée différente de l’école et auront un emploi du temps quotidien différent pour ne jamais se croiser. « L’idée est de penser un non-brassage dans le temps et l’espace », résume Yannick Kerauffret.

Mais si la Malmedonne est prête à ouvrir dès cette semaine, ce ne sera pas le cas pour les autres écoles maurepasiennes. « Il y a deux maîtres-mots : sécurité et progressivité, insiste Grégory Garestier. On s’est donné pour objectif d’ouvrir toutes les écoles le 25 mai, [et] que toutes les familles inscrites sous forme de volontariat puissent être accueillies. Aujourd’hui, techniquement, nous ne pouvons pas ouvrir toutes les écoles parce que nous n’avons pas encore reçu tous les kits sanitaires qui permettent d’assurer la sécurité sanitaire. » Il précise que, si les conditions le permettent, d’autres écoles pourraient ouvrir avant le 25 mai.

D’autant que le respect du protocole nécessite beaucoup plus de personnel communal dans les écoles qu’en temps normal. « En termes d’effectif RH, comme il y a beaucoup plus de nettoyage, c’est trois fois plus de monde que d’habitude, estime Grégory Garestier. On mobilise des agents du service des sports, de la jeunesse, des crèches, etc. »

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