Les membres du bureau de l’Amap 100 % Villepreux s’activent, le 19 mai en fin de journée, dans la confection des paniers de légumes, sous le regard de Clément Bénil, maraîcher villepreusien ayant une petite exploitation. Depuis le confinement, cette Association pour le maintien d’une agriculture paysanne a changé son mode de distribution. Désormais, un système de drive permet aux bénévoles, masqués, de laisser sur une table le lot de denrées, pendant que le client, également masqué, s’en approche en voiture pour ensuite le récupérer.

Mais ce changement est peut-être le seul qu’ait connu le maraîcher de Villepreux depuis le confinement. « Pour moi ça a été facile, c’est l’Amap qui a pris en charge toute l’organisation », reconnaît-il. Sachant que Clément Bénil fait partie des agriculteurs bénéficiant de l’Amap 100 % Villepreux pour assurer la vente de ses légumes bio.

C’est également le cas de Florence Morlière, à la tête d’une petite exploitation de poules pondeuses, de ruches et de fruits rouges, également à Villepreux. Elle aussi n’a pas connu de grandes différences. « Ça s’est passé comme s’il n’y avait pas eu de confinement, témoigne-t-elle. J’ai continué à travailler et j’ai eu de la chance avec le réseau de l’Amap qui a maintenu les distributions. » Florence Morlière a même pu embaucher comme prévu une personne à mi-temps.

Mais tous les agriculteurs n’ont pas pu bénéficier des avantages de l’Amap. Antoine Frémin, producteur de pommes, poires et prunes, a connu le confinement sans les marchés de Maurepas et de Fontenay-le-Fleury, où il se rend d’habitude. « Il fallait se réorganiser. […] On a fait de la livraison à domicile à la place des marchés. On livrait environ 200 paniers par semaine », explique-t-il. Cette nouvelle tâche était fatigante car ils ont dû ajouter à leur travail habituel, la préparation des paniers et leur livraison. Néanmoins, le producteur tempère : « On a eu de la chance que ça arrive en saison creuse pour nous. On avait moins de produits. Ça a fait moins mal. »

La surcharge de travail faisait donc partie du nouveau quotidien des agriculteurs. Clément Bénil l’a ressentie suite au confinement de la personne qui l’assistait au quotidien dans son exploitation. Sachant que celui-ci ne reviendra sûrement pas, pense le maraîcher, qui ne cherche pas à embaucher quelqu’un d’autre pour l’assister. « Je n’ai pas les mêmes problèmes que ceux des grosses structures », justifie-t-il.

« J’ai continué à travailler et j’ai eu de la chance avec le réseau de l’Amap qui a maintenu les distributions, » explique Florence Morlière, qui a même pu embaucher comme prévu une personne à mi-temps.

Pourtant, ce n’est pas l’offre de main-d’œuvre qui manquait. « J’ai eu beaucoup trop de propositions. J’aurais pu faire centre de formation. Une trentaine de personnes sont venues proposer leurs services sur place ou par mail ou par téléphone », raconte Clément Bénil, qui n’a pas toujours bien pris cet élan de solidarité. « C’est limite décrédibilisant, car on oublie que c’est un métier qui s’apprend », affirme-t-il.

Tous les agriculteurs semblent avoir reçu des propositions pour venir les aider. Antoine Frémin en a reçu une dizaine, Florence Morlière également. Elle raconte : « J’ai eu pas mal de gens, des mamans, des personnes sans activité. Je n’en avais pas besoin. » Le producteur de pommes, poires et prunes non plus. « Nous avons fait le choix de ne pas prendre d’autres personnes pour nous aider. […] Déjà pour éviter d’avoir et de propager la maladie dans nos équipes, et on avait nos effectifs au complet », explique Antoine Frémin.

D’autres encore, comme Alexandre Rueche, céréalier yvelinois possédant des champs à SQY, n’avait pas le temps de former les volontaires. « C’était délicat pour libérer du temps pour former les arrivants et c’était trop compliqué avec les enfants », témoigne-t-il. Ce dernier n’a d’ailleurs pas rencontré de problèmes au sein de son exploitation. « Les fournisseurs sont restés ouverts. On a toujours été fournis en semences en temps et en heure », affirme-t-il.

À défaut de prendre des volontaires pour les aider dans leurs exploitations, des agriculteurs ont préféré s’entraider. Dans son verger à Plaisir, Anne-Cécile Lefebvre, n’a pas pu bénéficier des ouvriers de province venant auparavant l’aider à tailler ses pommiers. Alors, un arboriculteur de Feucherolles lui a prêté sa main-d’œuvre. Et pour elle aussi, « il n’y a pas eu de changement ».

Le confinement semble donc s’être bien passé pour les agriculteurs de Saint-Quentin-en-Yvelines, notamment en raison de leurs petites exploitations. Ce qui n’est pas toujours le cas des grosses structures. Par exemple une surproduction serait à craindre pour elles, en raison de la non-activité de la restauration collective, illustre Alexandre Rueche.

Le calme des champs rompu après la fin du confinement

Alors que ces deux mois de quarantaine ont été particulièrement calmes pour les agriculteurs, le déconfinemenent a radicalement mis fin à cette quiétude.

Les agriculteurs de SQY ont notamment vu la différence le premier week-end de la fin du confinement. « Le bruit a changé », affirme Clément Bénil, maraîcher à Villepreux. « Beaucoup de Parisiens sont venus ici se promener », témoigne Laurence Morelle-Losson, membre du bureau au sein de l’Amap 100 % Villepreux (également conseillère municipale à Villepreux, Ndlr).

Et malheureusement cela aurait donné lieu à des incivilités. « Les gens étaient tellement contents de se balader, qu’ils se sont garés n’importe où, […] par exemple sur un champ qui venait d’être labouré. Ils ne se rendent pas compte que c’est un lieu de travail », raconte-elle.