Ils étaient 60 à 70 le 6 février au matin, réunis devant l’immeuble de la direction départementale de La Poste, à Guyancourt, pour soutenir leurs collègues qui devaient passer le même jour en entretien disciplinaire. Eduardo, Adrien, Nicolas, Gil et Vincent, postiers à Versailles, étaient en effet convoqués en entretien préalable avant sanction pouvant aller jusqu’au licenciement.

Une convocation qui fait suite à plusieurs grèves, et notamment une de 43 jours en décembre, lors de laquelle certaines avancées avaient été obtenues. « On prend ça comme une vengeance de la direction contre les grévistes », confie Vincent, également représentant départemental CGT-Fapt 78. Une direction qui a même accusé les cinq postiers de séquestration, faits qui remonteraient à un blocage du 13 décembre. Des accusations totalement fausses selon Vincent.

« Il y a un article qui a fait la une de L’Humanité, car ils ont fait faire des faux témoignages à des agents d’un site annexe du centre de courrier principal de Versailles, et ces agents se sont rétractés par un autre témoignage écrit sur un document officiel sur Cerfa, pour dire que le directeur les avait forcés à écrire n’importe quoi. » L’article en question parle notamment d’« une affaire de séquestration montée de toutes pièces par la direction », peut-on y lire.

Vincent évoque « des soutiens (notamment des représentants syndicaux d’autres professions, Ndlr) qui étaient devant le centre et qui ne séquestraient personne », lors de ce blocage interprofessionnel. « Il y avait d’ailleurs un ou deux employés qui entraient et sortaient, poursuit-il. Nous, les postiers, on était sur le trottoir d’en face, et ils nous accusent malgré tout de séquestration. »

Parmi les personnes ayant pris part au blocage, Matthieu Bolle-Reddat, de la CGT cheminots. « Les cinq [postiers] n’ont pas bloqué, ils étaient sur le trottoir d’en face, moi j’ai bloqué et pas eux, confirme-t-il devant les salariés mobilisés, le 6 février, avant de lever les yeux vers le bâtiment et de lancer ironiquement à la direction : « Pourquoi moi je ne suis pas viré, je suis jaloux. »

Vincent, lui, l’affirme : « On y va offensifs, on n’a rien à se reprocher. […] Comme c’est clairement une attaque contre le droit de grève, on va leur démontrer que l’on n’a rien fait et qu’on a des attestations de salariés qui le prouvent, et qu’en plus ça sort dans les médias. On a toutes les billes de notre côté. » Il envisage aussi de « certainement porter l’affaire devant les tribunaux, car c’est une espèce d’abus de confiance, de manipulation des gens pour leur faire écrire n’importe quoi ». Mais il demande surtout, dans un premier temps, un abandon des poursuites contre lui et ses quatre collègues.

Un nom ressort de manière récurrente de la bouche des manifestants : celui du directeur de l’établissement de Versailles, en poste depuis novembre 2018. Ils lui reprochent d’avoir contribué à des « mensonges » et des « manipulations », et « tout le temps des convocations pour mettre des pressions » aux salariés, d’après Vincent, qui en est déjà à sa quatrième convocation disciplinaire. Mais pour Gaël Quirante, secrétaire départemental Sud Poste 92, également présent lors du rassemblement, « le responsable » est celui qui « couvre » ce directeur, en l’occurrence, selon lui, le directeur exécutif Île-de-France Ouest de La Poste. Il réclame que ce dernier reçoive une délégation syndicale, mais aussi, qu’une enquête soit « diligentée par la direction régionale sur [le directeur de Versailles] et ses faux témoignages ».

En parallèle à la mobilisation, une grève massive était prévue à Versailles. « Il va y avoir 90 % de grévistes dans l’ensemble des services, sur 120 salariés environ, assure Vincent. Ça fait peut-être 20 ans qu’un centre de cette proportion n’a pas été en grève aussi massivement. » Contacté, le pôle régional du groupe La Poste indique qu’il ne s’exprimera pas « tant que la procédure est en cours et qu’aucune décision n’a été prise » concernant les cinq salariés en question.