« Ils veulent tous intégrer un club de foot », affirme Marie-Josèphe, responsable de l’équipe locale du Secours catholique. Le samedi 22 juin, elle est venue assister à un match de football entre mineurs isolés étrangers, sur l’un des stades en plein air de Coignières. Logeant à côté, dans des hôtels sociaux comme le Pariswest ou le Rev’hôtel, à Coignières, ces migrants, principalement issus d’Afrique subsaharienne, « s’adonnent à leur passion », commente la responsable, en regardant la rencontre.

Cet après-midi, ils sont 25 à être venus taper le ballon. Pendant le match, aucune balle n’est laissée au hasard. « Ça joue très bien », confirme Denis, arbitre bénévole au Secours catholique et organisateur de ces matchs, ayant lieu deux fois par mois, depuis maintenant deux ans. Pendant la deuxième mi-temps, l’équipe rouge mène 1 à 0 contre l’équipe noire. Derrière la ligne, le migrant guinéen Mohamed* vient d’arrêter de jouer pour cause de blessure. Il reconnaît les bons joueurs de l’équipe gagnante : « Les 8, 9, et 7 jouent bien. » Et justement certains de ces jeunes tentent, tant bien que mal, d’intégrer un club de football. Une manière pour eux de s’intégrer.

C’est le cas de Yassine*, alors en tournoi à Lille au même moment. Originaire de Côte d’Ivoire, il est arrivé en France en septembre 2018 et il a depuis intégré le club de Maurepas à la fin de la saison dernière. « Quand je suis arrivé à Pariswest, je me suis engagé, je me suis renseigné auprès des bénévoles du Secours catholique pour avoir plus de contacts dans le domaine du foot », raconte-t-il.

Passionné de football, il courait déjà après le ballon en Côte d’Ivoire avec ses camarades du catéchisme. « La France, c’est le seul pays où je peux avoir plus de chances pour devenir professionnel », confie l’Ivoirien, âgé de 17 ans maintenant. Mais tout le monde n’a pas reçu son projet de la même manière. « Ici, tout le monde vous dit que je ne suis pas là pour jouer au foot, avoue Yassine. Mais que je suis là pour travailler, pour trouver une formation. » Pourtant, la pratique de ce sport reste son projet de vie.

Il a donc trouvé du soutien auprès des bénévoles du Secours catholique, qui ont contacté le président du club de Maurepas. Celui-ci a proposé à Yassine de passer une semaine d’entraînement au sein de l’équipe. Et il a été recruté. C’est une première bataille gagnée pour le jeune joueur, qui ne compte pas s’arrêter là. « Je parle français, je sais lire et écrire. […] Je suis concentré maintenant pour trouver une formation », assure-t-il.

« Ici, tout le monde vous dit que je ne suis pas là pour jouer au foot, avoue Yassine. Mais que je suis là pour travailler, pour trouver une formation. » Pourtant la pratique de ce sport reste son projet de vie.

Et les opportunités ne manquent pas. Yassine a reçu une proposition de formation au club de la commune, pour devenir éducateur sportif et former les joueurs de huit ans. Il a aussi la possibilité de faire une alternance dans le bâtiment ou chez Hachette pour faire de la métallurgie. Mais le jeune homme de 17 ans n’a pas encore fait son choix.

D’autres migrants mineurs de Coignières ont la même volonté que lui, même si ce n’est pas toujours simple pour eux d’intégrer un club de foot. Adama* a déjà fait un essai à Vitry-sur-Seine. Mais « c’est trop loin » de son hôtel Paris West, regrette le mineur ivoirien. « Depuis que je suis en France, je joue, j’ai appris à jouer dans la rue et j’aimerais bien être dans un bon club parce que tu apprends mieux que si t’es dans un club moins bien », explique-t-il. Et « Adama joue très bien », affirme Denis. Ce dernier essaye d’aider ces mineurs isolés étrangers à prendre contact avec des clubs, quand ils le lui demandent. Mais ce n’est pas toujours simple, en raison des allers et venues. Certains arrivent dans un hôtel social, puis partent dans un autre au bout de quelques mois, comme l’explique l’arbitre. Par exemple, « juste au moment où j’établissais le contact avec le club de Trappes pour un des jeunes, il a déménagé », illustre-t-il.

De même pour Amali*, Denis a essayé de le faire rentrer au club de Maurepas en juin. Mais « ils n’ont pas voulu car son arrivée en fin d’année risquait de déstabiliser l’équipe, explique le bénévole. Mais il peut s’inscrire pour l’année prochaine. »

Mais Amali risque d’être confronté à un autre problème. Le paiement de la licence du club est un frein majeur à leur inscription. Accompagnés par le service d’aide social à l’enfance du conseil départemental, les mineurs isolés étrangers reçoivent, selon Marie-Josèphe, de l’argent sous forme de ticket pour pouvoir se déplacer en transport en commun et s’acheter à manger. Ils n’ont donc pas suffisamment d’argent pour se payer une licence.

Et s’ils souhaitent travailler, « la cellule des mineurs non accompagnés doit avant tout vérifier leur âge en réalisant des tests osseux, puis leur faire passer des tests pour déterminer leur niveau de scolarité », détaille Marie-Josèphe. C’est seulement après ces procédures que « la mission locale accompagne les jeunes vers l’insertion professionnelle », explique-t-elle. En attendant, Denis souhaiterait que le Secours catholique participe financièrement au paiement des licences ou que le club baisse ses tarifs. Mais la responsable locale de l’association tempère : « Comme leur situation n’est pas stable et qu’ils peuvent partir à tout moment, ça serait compliqué pour nous de payer leur licence. »

* Les prénoms ont été modifiés à leur demande.