Les casquettes fleurissent, le long des allées du transilien N, vendredi 28 septembre au petit matin. En ce premier jour de compétition de la Ryder cup, nombreux sont ceux à s’être levés aux aurores pour emprunter le premier transilien à destination de Saint-Quentin-en-Yvelines. Si au départ de Paris Montparnasse, à 4 h 50, les wagons sont loin d’être pleins, ils se peuplent peu à peu au fil des gares traversées : Chaville rive-gauche, Versailles chantiers, Saint-Cyr…

Bientôt les supporters, européens comme américains, investissent gaiement les wagons, dans un calme mêlé d’excitation. Dans le murmure des conversations, difficile de capter une voix française, la dominante de supporters anglophones se fait nettement sentir. Certains, qui arborent le drapeau étoilé américain sur leur tee-shirt, sont venus de loin.

« On est arrivés samedi dernier, tout droit d’Orlando (Floride), enfin presque », rigole David, la cinquantaine bourrue, venu avec sa femme et son fils de dix ans pour assister à ce qu’il appelle « la plus belle compétition du monde ». Tandis que la nuit défile derrière les vitres du train, il raconte sa passion pour le golf, sport qu’il pratique depuis l’enfance et qu’il enseigne à son fils. Logés sur Paris, il ont déjà assisté aux premiers jours d’entraînement.

« On va vous laminer, plaisante David gaiement. Non, sans rire, ça va être une compétition géniale, et le green est vraiment beau et bien vert, il doit pleuvoir beaucoup chez vous ! ». Quelques sièges plus loin, deux amies venues pour leur part de Denver ne cachent pas un intérêt plus modéré pour le jeu à 18 trous : « On avait prévu un voyage à Paris depuis longtemps, donc quand on a vu qu’il y avait la Ryder cup, on a décidé de prendre nos billets à ces dates. On n’assistera qu’aux matchs d’aujourd’hui. » Seules femmes du wagon, les deux amies agitent doucement le drapeau aux 50 étoiles.

Dix minutes d’arrêt à Versailles, les supporters s’agitent, le nez collé à la vitre : « Quand est-ce qu’on va repartir ? On risque de louper la navette. » Tous veulent les places les plus proches du parcours dans les gradins, et il faudra pour cela emprunter les premières navette vers le Golf national, à la sortie de la gare de Saint-Quentin-en-Yvelines. Si les supporters américains arborent fièrement leurs couleurs, le transilien de 4 h 50 reste celui des supporters britanniques, de loin les plus nombreux et les plus enthousiastes.

« C’est complètement fou que ça se passe en France, à littéralement quelques kilomètres de chez nous, s’exclame George, qui vient de Brighton (Royaume-Uni). Ma mère et ma sœur savent que je suis ici et elles me demandent sans arrêt des photos. » Autour de lui, ses comparses, la casquette vissée sur la tête, ont engagé une discussion animée au sujet de Tiger Woods. « C’est son grand retour, c’est phénoménal, en plus il a l’air d’être en forme vue sa victoire dimanche au Tour Championship. On attend beaucoup de sa part, du grand spectacle ! ». Et d’imiter le bruit du tigre.

Tapis dans un coin du wagon, à l’abri des effusions anglaises, un groupe de Français attend l’arrivée. « Nous ? On est venus supporter l’équipe européenne bien sûr, explique Arnaud, Parisien de 36 ans. Même si on est un peu déçus qu’il n’y ait aucun Français… C’est tout de même dommage, avec les athlètes qu’on a ! » Et de citer Alexander Levy ou encore Grégory Bourdy.

« Mais l’équipe européenne est forte, reprend-t-il. Et puis il y a Tiger Woods de l’autre côté, c’est pas rien. Même si on perd, on aura vu une star. Par contre gagner contre lui alors là ça serait une sacrée fierté, on en parlerait longtemps. […] En tout cas, c’est pratique que tout ça se déroule aux portes de Paris, j’avais jamais mis les pieds à Saint-Quentin-en-Yvelines avant, ça a l’air de bouger pas mal. »

Sa voix est soudain couverte par une annonce de la SNCF qui souhaite la « Bienvenue à la Ryder cup » et prévient de l’arrivée en gare de Saint-Quentin-en-Yvelines. Sur le quai, le flot de supporters s’écoule lentement dans les escaliers, avant de traverser le hall de la gare et de s’avancer dans la nuit jusqu’aux barrières de sécurité qui mènent aux premières navettes vers le Golf national où s’ouvre la compétition.

Des supporters « invisibles » pour les usagers de la gare

Et qu’en est-il des usagers de la gare de Saint-Quentin-en-Yvelines, qui commencent à affluer vers 6 h 45  ? Pour les Saint-quentinois qui prennent le train, les supporters semblent en fait surprendre par leur absence le matin. « En fait le matin on ne les voit pas, raconte Maud, guide touristique à Versailles, qui traverse la gare de Saint-Quentin aux alentours de 7 h. Ils arrivent bien avant nous, vers 6 h je crois, donc quand on arrive il n’y a presque plus personne, a part les retardataires ».

Même son de cloche chez Franck, qui sort du transilien U vers 7 h 25. « Moi la Ryder cup je ne la vois pas. A part les panneaux d’affichage et les indications vers les navettes, je n’ai croisé que quelques supporters. Du coup, j’oublie… » Il note tout de même la pénurie de croissants et pains au chocolats dans les commerces de la gare depuis quelques jours : « Je crois que ce sont les supporters qui mangent tout. »

Si les supporters se font donc discrets le matin, il n’en est pas de même pour le soir. « C’est cool qu’on accueille la Ryder cup et tout, mais du coup il n’y jamais de places assises dans le train, et ça à partir de 17 h », se plaint une étudiante de l’UVSQ. « Le gang des casquettes (les supporters, Ndlr) rafle tous les sièges  », renchérit son amie.