Les automobilistes l’auront sans doute remarqué, la semaine dernière, plusieurs stations-service des Yvelines, et même de toute l’Île-de-France, étaient en pénurie de carburant. La cause ? Une grève des transporteurs d’hydrocarbures dans plusieurs dépôts pétroliers franciliens, dont celui de Coignières, commencée le 4 décembre.

Les livreurs d’hydrocarbures, qui avaient installé un piquet de grève devant le site coigniérien, s’opposaient au projet du groupe TotalEnergies d’installer des caméras embarquées dans les cabines des camions de livraison. « C’est un système qui alerte à la moindre anomalie le conducteur et le transporteur, qui donne des consignes et enregistre un clip vidéo de l’anomalie. Elles sont de tout type, de la fatigue du chauffeur avec une caméra infrarouge qui suit les yeux, même à travers des lunettes de soleil, à la plus petite collision », détaillait un gréviste, interrogé par 78actu.

Ils ont finalement obtenu l’annulation, annoncée dans la soirée du 6 décembre par TotalEnergies, de ce projet qualifié par le groupe pétrolier de « plan de renforcement 2023 de la sécurité du transport routier », mais que les salariés protestataires jugeaient intrusif, voire répressif. « On est satisfaits, confient les conducteurs en grève, issus de sept ou huit sociétés de transports et rencontrés le 7 décembre devant le site de Coignières. Au départ, ça ne nous convenait pas, car c’était une suspension. […] Une suspension ne veut pas dire une annulation, ça n’empêche pas qu’ils remettent ça sur la table. On met en avant la sécurité, mais là, c’était du flicage. »

Les salariés des sociétés de transport d’hydrocarbures, qui ont souhaité conserver l’anonymat, estimaient également ne pas avoir été concertés sur ce projet de TotalEnergies : « À la base, on ne nous a pas demandé notre avis, les entreprises ne nous ont pas concertés. Aujourd’hui, on a de plus en plus de responsabilités, on est de plus en plus fliqués sur tout, alors mettre des micros… »

TotalEnergies, qui ne nous a pas répondu avant la mise sous presse de notre édition, avait assuré, dans des propos rapportés par 78actu, que le groupe ne demandait « pas l’enregistrement ni le stockage ou la transmission d’images, le système étant seulement dédié à l’alerte du conducteur ». « Chaque société de transport sous-traitante a mené les études techniques au cours de l’année 2023, tout en animant le dialogue social associé », s’était par ailleurs défendu le géant de l’énergie chez nos confrères.

TotalEnergies avait dans un premier temps annoncé des amendements, dans un texte cosigné avec le ministère des Transports, rapporté par 78actu : « Concernant les dispositifs de détection fatigue/distractions, nous apportons les amendements suivants : levée de l’obligation de l’enregistrement de clips vidéo en cas d’événements ; levée de l’obligation de transmission des alertes au transporteur ; levée de l’obligation de consignation des événements dans un grand journal. »

Insuffisant pour les transporteurs, qui ont donc obtenu l’arrêt complet du projet, mais préféraient encore attendre avant de mettre fin définitivement à leur mouvement. « On est en plein négoce. On demande à ce que la manne financière, ce qui a été perdu pendant les jours de grève, soit couverte par les entreprises, expliquaient-ils le 7 décembre. On a transmis les infos sur la fin de la grève, on attend un retour des entreprises. Il faut que toutes les entreprises soient en accord. C’est plus ou moins en bonne voie, mais tant que ce n’est pas signé … » Selon eux, « 95 % des gars [sur le site de Coignières] ne travaillent pas ».