Une centaine de personnes avaient investi, malgré la pluie, le grand rond-point situé en face de l’entrée du personnel d’Airbus Defence and Space (ADS), à Élancourt, le 15 mars. Des salariés en grève, mobilisés pour leurs salaires à l’appel des syndicats CGT et CFDT, ainsi que l’Unsa sur le site de Toulouse, qui manifestait au même moment.
Ce qu’ils réclament : 6,7 % d’augmentation sur un an, tandis que la direction leur propose 6,2 % sur deux ans. « Même pas de quoi rattraper 2021, ni couvrir l’inflation 2022 (déjà 3,6 % sur un an à fin février), sans même parler de 2023 », peut-on notamment lire sur le communiqué des syndicats, rappelant aussi les résultats records du groupe (4,2 milliards d’euros de bénéfices en 2021, Ndlr) ou encore la politique salariale 2021 « faible et très injuste pour de nombreux salariés ».
« En 2021, la plupart ont eu minimum 0,7 ou 0,9 % d’augmentation générale », se plaint Pascal Jaugeas, secrétaire général CGT chez ADS, soulignant même que l’année dernière, « il y a eu 38 % d’ingénieurs et cadres qui ont eu 0 %, et quasiment 30 % de non cadres. » « C’est complètement inadmissible », poursuit-il.
Alain Bessard, délégué syndical central (DSC) adjoint à la CFDT, dénonce lui « une politique salariale très frileuse l’année dernière ». Et ce, même si le salaire moyen sur le site d’Élancourt, composé à 80 % d’ingénieurs et cadres, avec un âge moyen supérieur à 40 ans, se situe aux alentours de 5 000 euros bruts mensuels, selon lui. Mais insuffisant, estime-t-il donc, pour faire face à une « inflation galopante » et à « la perte de pouvoir d’achat ».
« L’hypothèse de l’inflation au cœur de la discussion de la politique salariale de 2021, c’était que l’inflation serait à 0,6 %, or elle a explosé », rappelle-t-il. D’autant que tout le monde n’a pas le même niveau de rémunération, loin de là, fait remarquer Pascal Jaugeas : « Il y a ADS, mais aussi sur le site ADS Cybersecurity, et tous les prestataires, les sous-traitants, et eux, ils sont payés quasiment au Smic, et les augmentations, ils n’en ont pas. »
Les salariés sont donc déterminés à obtenir beaucoup plus cette année. « C’est très bien qu’on soit rassemblés tous ensemble ici, c’est important. Il y a un vrai problème dans cette entreprise, de conditions de travail, mais aussi de salaires. Il y a un problème d’attractivité. L’entreprise, que ce soit ADS ou Airbus avions, n’arrive pas à recruter. Après avoir licencié, après un PSE inutile, alors que l’on fait des bénéfices records, s’offusque Pascal Jaugeas. Une entreprise qui fait 4,2 milliards de bénéfices doit au minimum assurer le pouvoir d’achat de chaque salarié. » Les syndicats ne manquent pas non plus de rappeler que le PDG du groupe, Guillaume Faury, a lui bénéficié de 10 % d’augmentation en début d’année. « On a aussi participé, on y était aussi, il n’a pas obtenu ces résultats tout seul », lance Alain Bessard aux manifestants.
Le but est de faire revenir la direction « à une politique salariale sur une année, basée simplement sur l’année actuelle, et éviter de proposer un chiffre qui paraît gros, mais sur deux ans », affirme le DSC adjoint, en référence à la dernière proposition formulée par les dirigeants pour 2022 et 2023. « La politique salariale débute au 1er juillet 2022 et se termine le 30 juin 2023, précise-t-il. Si on regarde l’inflation naissante, on est déjà à 3,6 % ce mois-ci, et ça va encore augmenter. Ça bouge aussi dans les autres entités Airbus et cette proposition n’est acceptée par aucun syndicat. »
Des syndicats qui n’étaient pas tous présents à la mobilisation. Mais « il est fort probable » que les organisations absentes, en l’occurrence la CFE-CGC, FO et la CFTC, « se regroupent, mais au niveau groupe », fait savoir Alain Bessard, qui annonce déjà une nouvelle réunion pour le 22 mars, et probablement un nouveau mouvement cette semaine. « Ça va bouger, assure-t-il. On n’aura peut-être pas ce qu’on demande, mais on aura plus que ce qu’ils avaient proposé la première fois. »
Sollicité, ADS nous a répondu avoir « pris note de l’appel à la grève lancé par deux organisations syndicales ». « Airbus a démontré par le passé sa capacité à trouver des solutions par le dialogue social, et à améliorer les conditions de travail de ses employés. La direction poursuit les discussions avec les organisations syndicales représentatives qui le souhaitent en vue d’un accord dans le cadre des négociations annuelles obligatoires. Les propositions de la direction visent à la recherche du meilleur équilibre entre les attentes exprimées par les salariés en termes de pouvoir d’achat et le nécessaire maintien d’une compétitivité pour l’entreprise dans un contexte qui reste incertain », ajoute l’entreprise, rappelant que deux réunions de négociation se sont déjà tenues et qu’une troisième est prévue « afin de parvenir à un accord ».