Malgré le fond musical, l’ambiance était loin d’être festive le 23 novembre devant le siège yvelinois de l’Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh), à Guyancourt. Le personnel des quatre foyers Apajh des Yvelines – foyers des Saules à Magny-les-Hameaux, des Réaux à Élancourt, de la Plaine à Aubergenville et Le Manoir à Andrésy – était en grève afin de dénoncer les conditions salariales et de réclamer une revalorisation ainsi qu’une intégration à la prime Ségur (le personnel du médico-social dans le secteur privé en est pour l’instant exclu, Ndlr).
Ils sont aides médico-psychologiques (AMP), aides-soignants, éducateurs spécialisés, portaient l’inscription « en grève » sur leur masque, et avaient brandi des pancartes où l’on pouvait lire « Soignants épuisés, résidents en danger », « Soignants fatigués, salaire revalorisé », « Formés, diplômés, exploités et mal payés », « Soignants à bout, soutenez-nous », ou « Soignant pour la piqûre, soignant pour le Ségur ».
En une demi-journée, une trentaine de grévistes se sont mobilisés devant le siège. Parmi eux, Rachida, au foyer des Saules depuis plus de trois ans. « Ils nous ont dit qu’il y aurait une réunion le 15 janvier [au sujet de la prime], nous confie cette AMP syndiquée à la CFDT. Ils ont une réunion, mais ce n’est pas sûr qu’on l’aura. Ils nous disent : ‘‘Il faut patienter’’, mais on ne fait que ça, d’attendre. » Elle ajoute qu’au foyer des Saules, aucun titulaire n’a travaillé durant ce jour de grève, le service a été assuré par des vacataires.
Une manière aussi de pointer les manques d’effectifs. « On est normalement huit, mais vu qu’il y a pas mal de postes vacants, on se retrouve généralement à quatre ou cinq, évoque Rachida. On est censés être à trois le matin et deux l’après-midi minimum, mais des fois, on peut être deux, voire seuls. » Un phénomène directement lié aux conditions salariales. Selon l’AMP du foyer magnycois, les salariés gagnent autour de 1 300 euros nets mensuels, en comptant les primes du dimanche. « Personne ne veut venir travailler [ici], vu qu’il n’y a pas de prime Ségur, déplore-t-elle. Il y en a qui viennent, ils font une journée et repartent. Dès qu’ils voient les conditions par rapport au salaire, le travail qu’il y a à faire… ».
Elle fait état d’une vingtaine de départs en deux ans et parle d’une lourde charge « psychologiquement et physiquement », à la fois pour le personnel restant et les résidents, qui « en souffrent ». Même son de cloche chez Valérie, au foyer des Saules depuis 14 ans, et qui affirme n’avoir pas vu la situation s’améliorer depuis.
« Rien n’a changé, sauf des diminutions des journées associatives, par exemple, peste-t-elle. Au lieu d’avoir dix journées associatives par an, on est tombés à huit. Et ça, on nous l’a fait tomber comme ça. La plupart des salariés ne sont pas contents de leur travail […]. On bâcle. On est en sous-effectifs, donc on ne fait pas un travail de qualité, et c’est les résidents qui en subissent les conséquences. On se bat aussi pour eux. »
Sa collègue Mariam évoque elle le « ras-le-bol » au sein des équipes. « C’est la première fois qu’on fait grève. Là, on arrive à notre limite », abonde Rachida. Et la colère risque de ne pas s’estomper puisque, alors que des négociations avaient lieu à la mi-journée entre la direction et deux salariés de chaque foyer, ces derniers sont ressortis en rapportant n’avoir pas obtenu d’avancées satisfaisantes. « Ça a été un semblant de négociations, lance Lekmissi Mellouli, du foyer d’Aubergenville, devant les manifestants. « Je pense qu’on va durcir » le mouvement, assure-t-il, prévoyant des actions « plutôt sur décembre ». Rachida ne donne pas de date, mais annonce : « On va essayer de marquer le coup, ils ne vont pas s’y attendre. » Contactée, l’Apajh des Yvelines ne nous a pas répondu avant la mise sous presse de cette édition.