« La prolongation d’une foire. » Les mots sont de Jean-Jacques Brot, préfet des Yvelines, qui a assisté à la réunion publique concernant le projet de réhabilitation du Bois de l’étang à La Verrière, en tant que représentant de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) et de son dispositif de financement dont doit bénéficier le projet. Une réunion qui s’est déroulée le 5 juillet dans un climat d’extrême hostilité, au gymnase de la Fraternité. Environ 200 personnes y avaient pris place, dont un grand nombre réclamait « un projet sans démolition », comme on pouvait le lire sur les nombreuses pancartes brandies par une bonne partie de la foule.

Les habitants qui se sont manifestés s’opposent au projet prévoyant notamment la démolition de trois des dix tours de la résidence, soit 212 logements sur 619. Ils reprochent aussi au maire, Nicolas Dainville (LR), d’avoir changé de position sur le sujet sans les consulter, lui qui s’était affiché, lorsqu’il était dans l’opposition, contre la démolition, avant de changer d’avis après son élection à l’été 2020.

L’édile a été le premier à s’exprimer lors de la réunion. « Il y a un fort attachement au quartier, à son identité, au voisinage, a-t-il expliqué sous la bronca. Mais il y a aussi des problèmes liés à la structure urbaine du quartier. On a un quartier qui date des années 70, qui est enfermé […], avec des problèmes de voitures ventouses, de mécanique sauvage, de points de deal, de vétusté […], de canalisations, de plomberie. […] Donc il y a une nécessité de réhabiliter les logements, d’apporter des solutions durables à des problèmes qui persistent depuis trop longtemps. »

Il a poursuivi en citant une enquête de Seqens, le bailleur de la résidence, montrant que « 25 % des habitants ne sont pas satisfaits » de l’état de leur immeuble, mais aussi « qu’il y a […] 163 demandes de départ, […] 60 % des locataires veulent changer de logement ». Il rappelle avoir initialement étudié un projet sans démolition, dit projet Castro, hérité de l’ex-municipalité : « Il faut près de 20 millions d’euros pour changer les canalisations, […] résidentialiser les parkings, sécuriser l’entrée des immeubles. […] Le projet Castro prévoyait de trouver ces 20 millions d’euros en construisant près de 600 logements tout autour du quartier. Il prévoyait même des tours plus hautes que les tours existantes. […] Ce type de projet aurait eu à notre sens pour conséquence d’aggraver les difficultés. »

Il affirme que l’Anru « permet d’avoir des moyens ». En l’occurrence, 60 des 77 millions d’euros, le reste étant financé par le Département, Saint-Quentin-en-Yvelines (SQY) et la Ville. « L’Anru, par contre, oblige à un certain nombre de contraintes, reconnaît le maire. Il y a un minimum de démolitions, […] sachant que l’ensemble des autres bâtiments sera réhabilité, et que tous ceux qui veulent rester dans le quartier pourront rester dans le quartier. »

Des propos qui n’ont pas apaisé le climat. « Si M. Dainville et son équipe avaient été transparents, on n’en serait pas là, a affirmé un habitant. On ne veut pas de démolition, nous ne sommes pas la minorité silencieuse. » Hocine Messous, président du collectif des locataires du Bois de l’étang, a lui fait état d’« une pétition de plus de 400 locataires qui nous disent ‘‘Nous n’avons pas été concertés […], et nous voulons un projet sans démolition.’’ »

Les huées et le brouhaha ne sont jamais retombés. Ils ont aussi été attisés, selon le maire, par des « agitateurs de l’extérieur ». « La salle a été conçue pour saboter le projet », a même lancé le préfet, qui a répondu avec fermeté à certaines invectives. Considérant que le projet Castro « n’aurait jamais été financé », Jean-Jacques Brot a aussi brandi la menace d’un éventuel abandon des fonds de l’Anru pour ce quartier : « Il y a suffisamment d’habitants, dans les Yvelines et dans d’autres départements, qui seront très heureux de trouver des crédits publics […]. Mais il ne faudra pas venir nous demander des réhabilitations. »

D’autres protagonistes du projet ont davantage tenté de rassurer les habitants, notamment sur le relogement. « Ces personnes à reloger, […] on leur garantit qu’elles trouveront un logement adapté et qu’elles pourront faire des propositions », abonde Raphaël Sodini, préfet délégué pour l’égalité des chances. « Je comprends la peur, mais je crois vraiment que c’est une chance à saisir pour votre quartier », ajoute-t-il à propos du projet Anru. Il justifie également le choix des trois bâtiments concernés par la destruction : « Ils ne sont pas dans le même sens que les autres et contribuent à enfermer le quartier. »

Nicolas Dainville insiste lui sur la charte de relogement, « un document inédit au niveau de SQY, entre les 11 bailleurs et les 12 Villes », qui « garantit un relogement aux personnes concernées en priorité ». Interrogé par la presse après la réunion, il s’est dit « triste pour la ville » des conditions dans lesquelles les échanges se sont tenus, tout en évoquant « des chiffres qui ne mentent pas », rappelant notamment les près de « 200 demandes de départ ». Une enquête sociale doit se dérouler jusqu’à fin septembre. Les premières réhabilitations sont prévues dès l’année prochaine.