« Si on démarre comme on est partis, je crains qu’on ne ferme bientôt les écoles à nouveau », s’inquiétait la semaine dernière Évelyne Diana-Bras. La secrétaire départementale de la Fédération syndicale unitaire (FSU) a eu sa réponse, lorsque le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a annoncé lors d’une conférence de presse le 22 avril les conditions dans lesquelles les écoles allaient rouvrir. Résultat, le protocole est presque inchangé. Des prises de décision qui ne font pas l’unanimité auprès des syndicats. D’autant plus qu’elles sont annoncées trop tard, au vu d’une rentrée des classes quatre jours après ses déclarations pour les primaires, et un peu plus d’une semaine après (le 3 mai) pour les collèges et lycées.

C’est notamment pourquoi la FSU 78 a déposé, la veille des déclarations du ministre, un préavis de grève à compter du 26 avril jusqu’au 30 du mois. « Une réouverture telle quelle de ces établissements scolaires à partir du 26 avril, dans les mêmes conditions que celles qui ont conduit à leur fermeture le 3 avril dernier, serait une véritable mise en danger des usagers, des personnels, et de leurs familles », indique le communiqué de la FSU des Yvelines.

Cet appel à la grève est un moyen pour les personnels de l’Éducation nationale de se mettre en retrait, s’ils estiment que leur sécurité est en danger. Selon Delphine Romagny, secrétaire départementale du Snes 78, seraient surtout concernés les Accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), les documentalistes ou encore les surveillants. Et les annonces du ministre, le lendemain de leur préavis, ne les ont pas fait reculer dans leur décision. Le manque d’enseignants remplaçants n’a pas suffisamment été pris en compte, selon la syndicaliste. Jean-Michel Blanquer a annoncé que des recrutements étaient en cours et que 5 000 d’entre eux avaient déjà été recrutés dans toute la France. Un chiffre dérisoire, selon Delphine Romagny.

C’est pourtant ce qu’avaient demandé les syndicats dans leur lettre ouverte, publiée le 13 avril, à destination de la préfecture, du Département, de la Région, des municipalités et de l’académie. Quand un enseignant est absent, les élèves sont répartis dans d’autres classes, ce qui facilite le brassage et la propagation du virus, soutient Évelyne Diana-Bras.

La preuve étant que, depuis la fermeture des écoles, « le taux d’incidence pour les 0-9 ans est passé de 279 pour 100 000 (semaine du 28 mars au 3 avril) à 120 pour 100 000 (semaine du 11 au 17 avril), et de 796 (semaine du 28 mars au 3 avril) à 426 pour les 10-19 ans », selon le communiqué de la FSU, citant le site Covidtracker.

L’installation de capteurs de CO2 pour surveiller la qualité de l’air a également été demandée dans leur lettre ouverte, tout comme la distribution de masques « corrects » pour les enfants et le personnel. Mais là encore, rien n’a été soulevé par le ministre. La vaccination ne serait également pas assez rapide, selon les syndicats, malgré la mise en place de créneaux prioritaires à la vaccination pour les enseignants et certains personnels de plus de 55 ans au centre de vaccination de Saint-Germain-en-Laye. Selon la FSU, le nombre insuffisant de doses de vaccin allongerait les listes d’attente, plutôt que de faciliter la vaccination. Par exemple, Évelyne Diana-Bras, également enseignante en maternelle, n’a toujours pas pu se faire vacciner. « Je suis en attente. Ce ne sera pas avant mi-mai ou fin mai », affirme-t-elle.

« Un renforcement massif des capacités de tests »

La cantine n’a également pas fait l’objet de directives supplémentaires, notamment pour favoriser l’application d’un protocole strict. « Il faut nettoyer entre chaque élève à la fin de chaque repas, mais ce n’est pas possible. Il faut faire trois services en une heure trente. On n’a pas les moyens supplémentaires », raconte Delphine Romagny, en faisant référence au manque de personnel.

Néanmoins, l’annonce de Jean-Michel Blanquer de mettre en place la demi-jauge dans les collèges peut être vue comme une avancée pour les syndicats, qui la réclamaient depuis l’année dernière. Sachant qu’elle est déjà mise en place dans les lycées. Au collège, la demi-jauge concernera uniquement les classes de quatrième et de troisième, situées dans les territoires les plus à risque, dont font partie les Yvelines. En revanche, la secrétaire départementale du Snes 78 souhaiterait que cette demi-jauge soit assurée à l’échelle de la classe et non pas à l’échelle de l’établissement. « Le chef d’établissement peut très bien mettre en distanciel les quatrième une semaine pour que tous les troisième viennent en classe cette semaine-là, mais du coup dans les classes ils seront toujours 35 », regrette-t-elle, en préférant l’organisation en demi-classe.

Enfin, comme l’avaient demandé les syndicats dans leur lettre, « un renforcement massif des capacités de tests » devrait avoir lieu. Depuis le 26 avril, des autotests devraient être proposés deux fois par semaine aux adultes en écoles primaires. Et dans le secondaire, ils devraient également être mis à disposition du personnel, dès la semaine prochaine, et pour les lycéens à partir du 10 mai.

En parallèle, des tests salivaires serviront aux élèves du primaire et du collège. Mais Delphine Romagny s’interroge sur la personne qui va être en charge de leur réalisation, surtout quand on sait que, par exemple, les lycées de Villaroy, Descartes, les Sept Mares et Dumont d’Urville n’ont qu’un demi-poste d’infirmière par établissement. Le manque de personnel continue donc d’être un problème majeur pendant cette crise.

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