Entre mars et août 2020, le nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) a augmenté de l’ordre de 10 % dans les Yvelines, soit 2 500 demandes en plus, tous secteurs confondus, selon Laurence Bohl, directrice de l’insertion et de l’accompagnement social à la direction générale adjointe de la solidarité au conseil départemental. « On a une population qu’on n’avait pas observée avant », indique-t-elle.
Ces nouveaux bénéficiaires sont principalement les jeunes, les indépendants et les contrats précaires, issus des secteurs tels que l’industrie ou le service. « Dans cette augmentation des bénéficiaires du RSA, bien sûr on peut considérer qu’elle concerne des gens au chômage de longue durée, mais le ralentissement de l’économie dû au Covid a touché les CDD, les contrats en intérim. C’était des actifs et ils ont été en première ligne », confirme Marie-Laurence Chateau, responsable de la communication de l’agence départementale d’insertion Activity.
Cette augmentation s’explique aussi par l’absence de reprise d’activité des allocataires, après avoir perçu le RSA. « On a plus d’entrées, mais la conjoncture est telle qu’il y a moins de sorties vers l’emploi », affirme Laurence Bohl, qui rappelle que les sanctions visant à réduire les allocations ont été suspendues.
Sont donc particulièrement touchés, la restauration, l’hôtellerie, et le tourisme, qui ont connu un stop avec le premier confinement, entraînant ainsi la fin de certains contrats ou le non-renouvellement d’autres. « Le service a été rudement impacté, témoigne Marie-Laurence Chateau. Beaucoup d’emplois précaires ont été touchés. » C’est pourquoi Activity a pour projet de soutenir l’emploi dans la restauration collective, comme dans les hôpitaux et dans les Ehpad, pour notamment réorienter ceux qui ont perdu leur emploi vers ce domaine.
Les secteurs de l’automobile et de l’aéronautique n’ont aussi pas été épargnés par la crise sanitaire. Ce qui donne lieu à des suppressions de postes, comme c’est déjà prévu chez Renault ou encore chez Airbus et leurs sous-traitants. « Les équipementiers, les concessionnaires, génèrent beaucoup d’emplois », affirme la responsable de la communication d’Activity, avant d’ajouter que les emplois précaires qui seront mis au chômage, seront les futurs bénéficiaires du RSA. Leur nombre va donc continuer d’augmenter. « La tendance va se confirmer, d’autant que les effets post-covid vont s’accentuer dans les mois qui viennent », confirme Laurence Bohl.
Les indépendants font aussi partie des plus touchés. L’Urssaf et l’Insee indiquent que 200 entreprises du département des Yvelines ont connu des défaillances depuis le confinement, en d’autres termes, des difficultés économiques pouvant aller jusqu’au redressement judiciaire.
Les jeunes ne sont pas épargnés. Surtout que le problème de l’emploi les concernant serait structurel, selon Marie-Laurence Chateau, et il se serait aggravé avec la crise sanitaire. « Les jeunes ne sont pas inclus naturellement dans le développement économique. […] Même les jeunes diplômés, par nature, ont des emplois précaires, comme des CDD ou des intérims », affirme-t-elle, observant une baisse de l’âge des bénéficiaires du RSA (entre 25 et 30 ans). Cette tendance se serait accrue avec la crise sanitaire. Entre 2016 et 2020, le pourcentage de bénéficiaires du RSA, qui ont moins de 30 ans, est passé de 11 % à 27 % du pourcentage global des allocataires.
Finalement, la crise aurait accentué des problèmes déjà existants au sein du marché de l’emploi. « Ça a rendu visibles des tendances du marché qui étaient latentes », pointe la responsable de la communication d’Activity, qui met l’accent sur le « désajustement » entre l’offre et la demande. Dans les Yvelines, la majorité de la population en difficulté serait éloignée des bassins de l’emploi, selon elle. Il existe donc des problèmes de mobilité, ce que la crise sanitaire a aggravé. Et, alors que la formation est un levier pour lutter contre ce « désajustement », là encore, le Covid-19 aurait mis un stop.
Alors? Activity propose des solutions pour y remédier. Une équipe d’entreprise est mise en place depuis 2020, pour débusquer le marché caché de l’emploi et faire le lien entre les entreprises et les candidats. Elle intervient auprès des secteurs qui sortent renforcés de la crise, comme la logistique, l’e-commerce, le transport de courrier, le recyclage, les espaces verts, le nettoyage. « On essaye de privilégier ces secteurs-là car on sait que ça recrute, assure Marie-Laurence Chateau. […] On va intensifier les formations dans ces secteurs et dans l’aide à la personne. »
Des chantiers d’insertion dans la production de masques ont également été mis en place cette année, notamment à La Verrière, pour accompagner les bénéficiaires du RSA dans leur projet professionnel. Enfin un Jobtour aura lieu du 23 au 27 novembre en visio entre les candidats et les entreprises.
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