« SQY s’en sort mieux que beaucoup d’autres bassins d’emplois de l’Île-de-France », affirme Hachemi Lamari, directeur territorial délégué Centre-Est des Yvelines à Pôle emploi. Ce dernier fait référence aux personnes dites « fragiles », qui n’ont pas connu en 2020 plus d’inscriptions au chômage que les autres, bien au contraire.

Pour preuve, les demandeurs d’emploi issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville représentaient 25,2 % des chômeurs à SQY au quatrième trimestre 2019. Ce chiffre est descendu à 24,4 % à la même période en 2020. Sachant qu’à Trappes « le quartier prioritaire de la politique de la ville est l’un des plus importants en France », affirme Hachemi Lamari. L’agglomération serait donc « un territoire privilégié », selon lui.

Pour autant, SQY n’est pas épargnée par l’augmentation du chômage, qui touche l’ensemble de la France en cette période de crise sanitaire. Toutes catégories confondues, le nombre d’inscrits a augmenté de 9,5 % en 2020 et d’environ 14,5 % pour la seule catégorie A, à savoir les demandeurs d’emploi sans activité. Cet écart s’explique par le basculement des demandeurs d’emploi d’une catégorie à une autre. En effet, pour beaucoup d’entre eux – en catégorie B, C, etc. – , leur contrat précaire, court ou en intérim, s’est terminé pendant la crise sanitaire. Ce qui les a fait passer dans la catégorie demandeur d’emploi sans travail. Globalement, « on a inscrit moins de personnes. On est face à une persistance du chômage », résume Hachemi Lamari.

Ces chômeurs ont en effet du mal à trouver une activité, notamment en raison de la chute des offres d’emploi à Pôle emploi, soit entre 18 et 20 % à SQY, au quatrième trimestre 2020, par rapport à 2019. « C’est énorme, s’inquiète le directeur territorial délégué, compétent sur le bassin de l’agglomération. Le marché de l’emploi s’est contracté même sur certains métiers liés au service à la personne ou encore au nettoyage. » Ces derniers faisant partie des nombreux postes à pourvoir.

L’emploi à SQY est traversé par une crise particulière en forme de K, selon Nicolas Dainville (LR), vice-président de Saint-Quentin-en-Yvelines délégué à l’emploi, à la formation professionnelle et à l’apprentissage au conseil communautaire. L’agglomération connaîtrait une rupture nette de son économie, symbolisée par la branche descendante du K, et une phase de reprise, représentée par la branche montante de la lettre.

Les secteurs en chute sont surtout la restauration, l’événementiel, ou encore le tourisme, selon le vice-président, également maire de La Verrière. « Tous ces secteurs restent impactés, c’est une catastrophe sur notre territoire », commente-t-il. À l’inverse, les secteurs qui progressent sont la santé, le service à la personne, le bâtiment, et le numérique.

Alors, les Saint-Quentinois les plus touchés par le chômage sont généralement les personnes faiblement qualifiées qui ont au maximum le niveau bac. Ils représentent 48 % des demandeurs d’emploi au quatrième trimestre 2020, selon les informations de Hachemi Lamari. Viennent ensuite les jeunes, représentant 29,5 % des chômeurs à SQY. Enfin, les personnes issues des quartiers prioritaires de la politique de la ville constituent 24,4 % des demandeurs d’emploi, à la même période.

Mais ces chiffres sont à nuancer quand on les compare au reste de la France. Les demandeurs d’emploi faiblement qualifiés correspondent à 53 % des inscrits sur le territoire national au quatrième trimestre 2020. Le directeur territorial délégué à Pôle emploi explique : « À SQY, on a une dynamique en termes d’économie et de qualification. On a une base plus qualifiée. »

« Il y a désormais plus de concurrence sur les offres »

« SQY résiste », poursuit-il. En effet, les seniors et les personnes en situation de handicap ont moins été touchés par le licenciement l’année dernière, comparé au reste de l’île-de-France et de la France. Le taux d’inscription des travailleurs handicapés est de 2,8 % à SQY au quatrième trimestre 2020, contre 5,7 % en Île-de-France et 7,8 % dans la France entière, toujours selon les chiffres de Pôle emploi. Il en est de même pour les bénéficiaires du RSA. Ils ont bondi de 19 % en France contre 16 % dans les Yvelines.

En revanche, le pourcentage des jeunes saint-quentinois au chômage (29,5 %) talonne celui de la France qui est de 30 %, selon Hachemi Lamari. « D’habitude on a trois points d’écart, souligne-t-il. Là c’est un vrai souci. Ça nous préoccupe beaucoup et nous nous mobilisons pour proposer des solutions. » D’autant plus qu’au quatrième trimestre 2019, ce taux de chômage à Saint-Quentin-en-Yvelines était de 27 %, selon les informations du directeur territorial de Pôle emploi.

Et cette situation pourrait perdurer avec la chute des offres d’emploi dans de nombreux secteurs. En un an, Pôle emploi a perdu entre 18 et 20 % de ses annonces à SQY en comparant les quatrièmes trimestres 2019 et 2020. « Les conseillers sont frustrés car l’accompagnement des demandeurs d’emploi est plus compliqué. Il y a désormais plus de concurrence sur les offres », explique Hachemi Lamari.

Cette situation a d’ailleurs participé à l’augmentation du chômage de longue durée. Les personnes déjà au chômage n’arrivent pas à retrouver d’emploi et la crise sanitaire n’arrange pas les choses. On est passé de 7 146 demandeurs d’emploi dans cette catégorie, soit 43 % des inscrits, à 8 053 à SQY, au quatrième trimestre 2019 et 2020.

Alors, hormis le niveau d’offres d’emploi du secteur de la santé et du service à la personne qui se sont maintenus, les autres connaissent parfois une baisse de leur nombre d’annonces. C’est le cas du secteur de l’industrie manufacturière, qui enregistre une chute de 33,7 % de ses offres, au quatrième trimestre 2020 comparé à 2019. La restauration et l’hôtellerie connaissent « une panne totale » avec une baisse de 38,9 %. L’informatique et la télécommunication sont frappées d’une baisse de 40 %.

Ces chômeurs ont en effet du mal à retrouver un travail, notamment en raison de la chute des offres d’emploi à Pôle emploi, soit entre 18 et 20 % à SQY au quatrième trimestre 2020 par rapport à 2019.

En revanche, d’autres secteurs ont été plus ou moins épargnés. C’est le cas des offres dans le commerce et la réparation automobiles. Ils ne connaissent qu’une baisse de 13,4 % au quatrième trimestre 2020, tout comme le BTP avec 14 %. Autrement, « les secteurs régaliens » gestionnaires de l’assainissement de l’eau et de l’électricité, comme EDF par exemple, et l’immobilier « sont restés solides » en termes de propositions d’offres d’emploi, comme l’observe le directeur territorial délégué à Pôle emploi. Et la vente automobile rencontre même une augmentation de 10 %.

Ainsi, certains secteurs recrutent plus que d’autres. Le service en entreprise, comme le nettoyage ou encore la comptabilité, serait le premier recruteur, selon Hachemi Lamari. La crise sanitaire vient ici justifier les besoins en hygiène. Le commerce et la réparation automobiles sont les deuxièmes filières à recruter le plus, même si elles connaissent une baisse. Elles sont suivies par l’action sociale et l’accompagnement des personnes fragiles, toujours sur le territoire de SQY.

En revanche, il existe des recrutements qui ne trouvent pas facilement preneur. C’est le cas des postes en tension, notamment dans le bâtiment. « [Ce dernier] est en crise de main-d’œuvre » souligne le directeur territorial délégué à Pôle emploi. Les postes qui ne sont pas pourvus sont « les façadiers, les étancheurs, ou encore les couvreurs », énumère Hachemi Lamari. Les métiers de la maintenance rencontrent le même problème, notamment dans le secteur de l’ascenseur.

Les coiffeurs sont aussi en pénurie. « Il y a beaucoup de personnes qui quittent la profession pour des problèmes de santé, les conditions de travail et le manque de reconnaissance. Et la plupart des personnes créent leur entreprise », explique le professionnel de Pôle emploi.

Les infirmières sont aussi très demandées, surtout dans le contexte actuel. Et si une professionnelle pousse les portes de Pôle emploi, c’est pour changer de métier le plus souvent, témoigne Hachemi Lamari.

Enfin les métiers liés au numérique sont également très en tension. « Ils ne connaissent pas la crise. On recherche des développeurs web, des compétences dans les objets connectés et dans la cybersécurité » énumère Nicolas Dainville.

Alors pour pallier cette pénurie dans les qualifications, des solutions sont mises en place, notamment dans la formation. 2 600, un nouveau centre de formation en alternance à SQY, spécialisé dans la cybersécurité, accueillera sa première promotion en septembre 2021.

Autre exemple, l’entreprise Kone, spécialisée dans les ascenseurs et les portes automatiques ,met en place des formations dans la maintenance, dans le cadre du plan gouvernemental « Un jeune, une solution », notamment pour ceux issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Aujourd’hui, la société dispose d’une quarantaine d’offres mais elle ne trouve pas preneur, selon le professionnel de Pôle emploi.

Bouygues service recrute également des apprentis pour ses métiers de service. « Il y a aussi de bonnes opportunités pour les personnes qualifiées ou pas, positive Hachemi Lamari. Malgré la crise, la richesse économique de Saint-Quentin-en-Yvelines donne des possibilités d’emplois qui sont meilleures que dans d’autres territoires. »

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