« Solidarité avec les sans-papiers du monde entier ». Le slogan a été chanté plusieurs fois. Le 14 octobre, à Plaisir, ils étaient une cinquantaine de sans-papiers – selon certains organisateurs – rassemblés devant le Centre de rétention administrative (CRA), un lieu symbolique où sont détenus les étrangers en situation irrégulière et qui, de plus, dans le cas de celui de Plaisir, est pressenti pour n’accueillir que ceux positifs au Covid-19. Les manifestants réclamaient une régularisation, la fin des CRA et un hébergement. Plusieurs organisations étaient aussi présentes, notamment certaines membres du Ramy (Réseau pour l’accueil des migrants dans les Yvelines), qui réunit les associations et collectifs yvelinois qui soutiennent les sans-papiers, demandeurs d’asile et migrants.
Parmi elles, la Ligue des droits de l’Homme de Mantes-la-Jolie, dont l’un de ses représentants, Alain Boudou, a précisé les trois revendications principales des manifestants : « La régularisation des sans-papiers – que ceux qui vivent ici, avec nous parmi nous, puissent enfin avoir un titre de séjour pour pouvoir être réguliers – qu’on arrête l’enfermement administratif – là, c’est un centre de rétention administratif, […] c’est ici qu’on enferme les sans-papiers, jusqu’à 90 jours sans jugement, […] -, et des hébergements pour tous. » Sur ce dernier point, il évoque notamment des migrants « déboutés de leur droit d’asile » et un 115 des Yvelines « saturé ».
Cette manifestation s’inscrivait dans le cadre d’une mobilisation nationale, La Marche des sans-papiers, avec des départs depuis les quatre coins de la France, pour rejoindre Paris, la destination finale, où une grande marche était prévue le 17 octobre en direction de l’Élysée. Une partie du parcours dans la capitale, entre place de la République et place de la Concorde, a néanmoins été interdit par la préfecture de police.
Le cortège passé par Plaisir était, lui, parti de Rennes le 3 octobre et composé de sans-papiers de différentes origines, comme Adburahman, 25 ans, qui a fui la Côte d’Ivoire depuis 2009 en raison de la guerre, et est arrivé en France il y a trois ans et demi. « On s’attend à ce que la France soit le pays des droits de l’homme, […] on veut avoir les papiers pour travailler, confie-t-il avant de désigner le CRA. J’ai des amis qui sont prisonniers dans ce centre, ils n’ont rien fait et on les prend et on les met là. » Nourri pas les Restos du cœur, dormant dans des squats l’hiver et dehors l’été, il affirme n’avoir « aucun travail en France, car je n’ai pas mes droits, pas de papiers, et je n’aimerais pas travailler sans papiers, j’aime respecter le droit. » « On n’est pas là pour faire la merde ou piquer le boulot, on est là car on a fui la guerre, la misère, on a fui beaucoup de choses », lâche-t-il également.
Des petits boulots, Abdel, originaire du Maroc, en a bien effectué quelques-uns, mais raconte s’être fait exploiter par des employeurs profitant de sa situation. « J’ai travaillé pour une agence de publicité, de 8 h à 19 h, pour 20 euros par jour », mentionne notamment ce sans-papiers de 45 ans, qui assure être titulaire d’un diplôme en économie et gestion reconnu en France, et d’un master en philosophie.
Ayant fui « l’oppression et les menaces […] de la part du régime politique » au Maroc, il estime que « la majorité des gens » de la marche « sont des gens dynamiques, honnêtes, et qui ont le droit et le mérite pour avoir une place dans la société française ». Pour lui, « il est temps pour la France » d’imiter « l’Italie, l’Espagne, le Portugal », qui « avec le Covid, [et] avec la fermeture des frontières, […] ont fait des initiatives de régularisation massive des sans-papiers. » À l’issue de la mobilisation à Plaisir, les manifestants partaient vers Coignières, où les salons Saint-Exupéry leur étaient notamment mis à disposition pour la nuit.