L’accord passé entre usagers et riverains de l’aéroport de Toussus-le-Noble permettra-t-il d’atténuer les nuisances sonores provoquées par le survol des avions pour les communes alentours ? En 2011, une plage de silence avait été obtenue, interdisant aux avions de voler tous les dimanches et jours fériés, de 12 heures à 15 heures, de début avril à fin septembre. Depuis, force est de constater que cela n’est pas suffisant pour les riverains survolés par des avions traversant le ciel, notamment ceux de Magny-les-Hameaux, ou de Châteaufort, Villiers-le-Bâcle, etc. Mais cette situation, souvent jugée insupportable, pourrait s’améliorer après des années d’actions des associations.
L’accord trouvé, entre autres mesures, réglementerait, toujours de début avril à fin septembre, mais désormais tous les samedis, dimanches et jours fériés, les tours de piste en fonction du bruit généré par les avions. En contrepartie, les avions les moins bruyants, dont les nuisances ne couvrent pas une conversation, ne seront plus soumis à la plage de silence. Si usagers et associations de riverains se sont mis d’accord, tous espèrent expérimenter ces nouvelles dispositions dès avril prochain … et attendent l’aval des services de l’État (qui n’ont pas répondu aux sollicitations de La Gazette).
Cet accord a été obtenu après de nombreux mois de négociation entre l’Alliance associative, collectif d’une quarantaine d’associations de riverains de l’aéroport nobeltussois, et l’Union des aéroclubs de Toussus (UAT), qui « regroupe les principaux aéroclubs de Toussus », explique Yves Gascuel, président de l’UAT. Les termes de ce projet de réduction des nuisances de l’aéroport ont été détaillés fin septembre lors de l’assemblée générale annuelle de l’Association ciel calme à Magny-les-Hameaux (ACCMH), membre de l’Alliance associative, qui milite depuis plus d’une décennie pour une réduction du bruit.
« Depuis 13 ans, on s’est aperçu que c’était relativement difficile d’avancer, concède Christian Mauduit, président de l’ACCMH et Magnycois travaillant de longue date sur le sujet, lors de l’assemblée générale du 26 septembre. On a fait quelques manifestations sur Toussus, avec des résultats pas forcément très intéressants, mais ça a quand même marqué les foules, et au niveau de la préfecture et de la DGAC (Direction générale de l’aviation civile). » Si les riverains avaient obtenu en 2011 l’instauration de la plage de silence du dimanche, un changement d’approche a permis d’aboutir au nouvel accord. « Depuis un peu plus de deux ans, on a changé de stratégie, et cette stratégie, c’est la communication et la négociation avec les usagers », souligne Christian Mauduit.
En effet, à cette période, l’Alliance associative a entamé des discussions avec l’UAT, également désireuse d’œuvrer pour une réduction des nuisances sonores. L’union des usagers de l’aéroport regroupe sept des neuf aéroclubs de Toussus-le-Noble (les pilotes privés et les hélicoptères n’en font pas partie, Ndlr) et « représente environ 80 % de l’activité tour de piste avion » pour « plus de 1 000 pilotes » d’après son président, Yves Gascuel. « Nous, on est des pilotes, on est passionnés par le vol, on a envie de voler, et on est bien conscients que si on veut continuer à voler, il faut qu’on le fasse sans embêter les riverains », confirme par téléphone Yves Gascuel, également vice-président de l’un des aéroclubs de Toussus.
Lors de l’assemblée générale de l’ACCMH, son président est revenu sur les longs échanges qui ont permis de trouver un terrain d’entente. « Ils ont décidé de discuter avec nous : leur enjeu est la suppression, pour les avions de bon niveau de performance, de cette plage de silence, raconte Christian Mauduit, satisfait des avancées remportées. En échange, on a obtenu que les avions bruyants, et dieu sait s’il y en a, soient beaucoup plus restreints les week-ends et jours fériés du 1er avril au 30 septembre, plus seulement le dimanche. Notre souci est d’avoir le moins de nuisances possibles. »
Dans les faits donc, plus un avion est bruyant, plus ses possibilités de voler en tour de piste sur ces périodes seraient limitées, avec des plages horaires autorisées. L’accord, qui une fois mis en place s’appliquerait à tous les aéroclubs, s’appuie pour cela sur le classement Calipso. Il s’agit d’« une classification sonore pour les avions légers basée sur des mesures prises en situations réelles de vol et exprimée au moyen d’un indice de performance sonore défini en référence au bruit maximal d’une conversation », détaille le site internet du ministère de l’Écologie.
Les modèles d’avions sont ainsi classés de A à D puis non classés, du moins au plus bruyant. « Un avion de classe A, en fait, ne perturbe pas la conversation, un avion de classe B un tout petit peu, mais les avions classés D ou non classés, sont les plus perturbants », résume le président de l’ACCMH, avant d’adresser à la trentaine de personnes venue assister à l’assemblée générale de fin septembre : « Moi je vous assure, les avions classés A qui passent au dessus de chez moi, ça ne me dérange pas. »
Le dimanche par exemple, les avions classés A récupèrent l’autorisation de voler de 12 h à 15 h, et sur cette même période, les avions classés B « auront le droit soit de faire une entrée, soit de faire une sortie mais c’est tout, [et] c’est limité à sept pendant les trois heures », détaille Christian Mauduit. En contrepartie, un communiqué de l’Alliance associative résume avoir obtenu « l’élimination de la quasi totalité des avions bruyants, le samedi et le dimanche ! ». Et estime que « cela représente 20 heures d’amélioration sur le week-end ».
Un accord « gagnant-gagnant », et un travail de concertation, dont se satisfait également le président de l’UAT. « Plutôt que de rester dans le monde de l’invective, des riverains qui veulent obtenir une interdiction totale, des pilotes qui veulent continuer à voler n’importe comment, ce sont des extrêmes qui ne nous semblent pas bons, souligne Yves Gascuel. On cherche donc une solution dans laquelle chacun fait un pas, qui permet aux riverains d’avoir beaucoup moins de bruit, et aux pilotes de continuer à voler […] à condition de ne pas faire de bruit. »
Ce mode de travail en collaboration trouve également grâce aux yeux du maire de Magny-les-Hameaux, Bertrand Houillon (Génération.s), joint par téléphone, qui alerte sur ce sujet de longue date. « C’est franchement un travail intelligent, apprécie l’édile. Quand on sait d’où on vient, avec les tensions qu’il y a autour de ce sujet, je trouve que rien que ce fait de dialogue est un très bel exemple. »
Bertrand Houillon confirme d’ailleurs que le survol des avions est un sujet de plaintes récurrent des habitants. « On s’en plaint tous, tranche le maire. Les week-ends sont des périodes infernales et puis mine de rien, avoir des survols très réguliers d’aviation au dessus de nos têtes, […] c’est quand même parfois inquiétant. » Le soir de l’assemblée générale de l’ACCMH, par exemple, une Magnycoise n’a pas caché son exaspération. « Je n’ai qu’une hâte, c’est de m’en aller, mais les maisons sont invendables, regrette-t-elle, visiblement sceptique sur une possible amélioration future. Ça fait 18 ans que j’habite au Village et c’est de pire en pire … »
L’accord représente malgré tout un premier pas vers une amélioration et Christian Mauduit mise également sur son « effet domino » sur le long terme : « Parce que, ne pouvant pas utiliser leurs avions le samedi et le dimanche, [les aéroclubs] qui ont des avions classés C et D, voire non classés, vont avoir un peu de mal à avoir des clients, donc ils vont être obligés de changer d’avions. S’ils changent d’avions, ça ne va pas être seulement les week-ends. Et on leur donne la possibilité, via un financement (une aide financière est prévue dans l’accord, Ndlr), de changer les avions. »
Et Christian Mauduit se montre rassurant dans le cas où l’amélioration espérée ne serait pas au rendez-vous : « On a eu la garantie que si on n’avait pas les résultats escomptés, cet arrêté serait annulé et on reviendrait à la situation actuelle (la plage de silence complète les dimanches midi d’été, Ndlr). Il y a peu de chance pour que ce soit le cas puisque finalement on va y gagner quand même beaucoup. »
L’accord trouvé entre l’Alliance associative et l’UAT ne comprend en effet pas que les restrictions de vols pour les avions bruyants. « Les aéroclubs travaillent à mettre en œuvre des mesures pour que les pilotes respectent un certain nombre de bonnes pratiques, qui permettent de faire moins de bruit », ajoute Yves Gascuel. Un travail sur de nouvelles trajectoires de tours de piste y figure également, étudiées conjointement par l’UAT et l’Alliance associative, « qui a un avantage important qui est de survoler le moins d’habitations possible », explique Bertrand Houillon. Mais ces nouvelles trajectoires sont soumises à la validation de la DGAC.
Désormais, élus, usagers et riverains affichent le souhait que cet accord soit expérimenté du 1er avril au 30 septembre 2019, mais sont suspendus à la décision des services de l’État, notamment de la préfecture qui devrait prendre un décret. Le maire de Magny-les-Hameaux indique ne pas avoir eu de nouvelles de la préfecture depuis « avant l’été » malgré une demande de réunion. « C’est un calendrier normal, mais maintenant il va falloir que l’on ait des nouvelles assez vite », prévient-il. Le président de l’UAT va dans le même sens : « Nous ce que l’on veut, c’est que tout soit en place avant la prochaine plage estivale. »
Si les habitants devraient constater une amélioration dans leur ciel concernant les survols d’avions, reste toujours la problématique des hélicoptères, avec qui le dialogue n’a pas encore été engagé. « Notre autre souci pour l’instant, c’est les hélicoptères, qui n’ont pas décidé de discuter avec nous, loin s’en faut », souligne Christian Mauduit. Le maire de Magny-les-Hameaux lance également un souhait à ce sujet : « J’appelle les usagers des hélicoptères a engager la même démarche avec les habitants, pour pouvoir dialoguer et trouver les meilleures solutions. »