Le facteur qui distribue le courrier, jusqu’ici rien de plus banal, mais certains, en plus, prennent en photo les habitants. En effet, La Poste a lancé depuis le 6 septembre l’opération Visages de France, prolongée jusqu’au 31 octobre. Des facteurs de tout le pays immortalisent les Français qui le souhaitent, « qui les touchent et qu’ils voient tous les jours », indique dans un communiqué le groupe La Poste, qui s’est associé à l’illustre photographe Yann Arthus-Bertrand, à l’initiative du projet.
Les plus belles photos exposées à La Poste du Louvre
« J’ai pris conscience et j’ai été impressionné par le lien social très fort et indispensable que les facteurs nous apportent sur tout le territoire, explique ce dernier dans le communiqué. Leur sens du devoir m’a touché. » La Poste assure de son côté que les facteurs « ont été sensibles à cette initiative qui permet à la fois de mettre en valeur leur métier, mais aussi les clients qu’ils croisent tous les jours pendant leurs tournées et qu’ils ont appris à connaître ».
Les facteurs doivent prendre six photos par habitant, leur faire remplir une autorisation de droits à l’image et envoyer les prises de vue à Yann Arthus-Bertrand via une application spécialement développée pour l’occasion sur leur smartphone-outil de travail connecté. Le 23 septembre, 7 000 photos, dont 1 000 en Île-de-France, avaient déjà été transmises. Les clichés recueillis par les facteurs seront mis à l’honneur à travers une exposition numérique fin 2021, et les plus belles photos, sélectionnées par Yann Arthus-Bertrand, seront exposées à La Poste du Louvre en 2022.
1 149 facteurs exercent dans les Yvelines. Parmi eux, à Élancourt, François Bonnière, qui a accepté de participer à l’opération et que La Gazette a suivi durant sa tournée, le 23 septembre, dans le quartier pavillonnaire de la Commanderie. Une tournée courrier, mais aussi une tournée photos donc. « Ça ne me dérange pas, et c’est un cadre qui est joli, nous a-t-il confié, lui qui en est à sa seizième année en tant que postier, et qui connaît bien un certain nombre d’habitants du quartier, où il a vécu par le passé. Je les connais bien, c’est des anciens voisins. […] Il n’y a personne qui m’a dit non. »
Ce jour-là, François Bonnière a photographié un homme de 39 ans, un couple de retraités et une jeune mère de famille. C’est chez le premier cité qu’il s’est d’abord arrêté. Benjamin habite le quartier depuis huit ans. « J’aime bien le contact avec les gens, donc je trouve que c’est une très bonne chose », estime ce conseiller clientèle en banque. Son de cloche similaire chez Michel et Marie-Paule, Élancourtois depuis 30 ans, qui mettent en avant les rencontres et le partage permis par ce projet. « On aime participer à tout ce qui se passe sur le secteur », affirme cette retraitée. « Sinon, les gens se rencontrent peu, il y a vite des strates de générations », termine son époux. La séance photos s’est achevée chez Cynthia, 33 ans, infirmière. « Je trouve ça très sympa, car déjà, notre facteur, on a de la chance car il est très proche, juge cette mère de deux très jeunes enfants. Ça crée du lien entre les gens, ce n’est pas que le côté très professionnaliste. »
Mais cette opération Visages de France ne se résumait pas à immortaliser les habitants chez eux. Les personnes photographiées devaient aussi répondre à des questions posées par leur facteur, sur la France, mais aussi sur elles-mêmes. Les questions : pour vous, c’est quoi la France ? C’est quoi le bonheur ? Qu’est-ce que vous aimeriez voir changer en France ? Qu’est-ce que vous aimez le plus en France ? Quelle est la chose la plus importante dans votre vie ? De quoi êtes-vous le plus fier ? Quel est votre plus grand rêve ?
Cynthia, par exemple, estime que la France est « un pays qui [l]’a très bien accueillie », dont elle apprécie particulièrement la liberté d’expression, elle a lié la notion de bonheur à celle de stabilité d’esprit, a souligné l’importance d’ « avoir un côté un peu plus écolo » parmi les choses à changer, et a bien sûr répondu que ses enfants étaient la chose la plus importante à ses yeux. Sur ce dernier point, Benjamin a déclaré la même chose, mettant en revanche à plusieurs reprises en avant la gastronomie française. Il aimerait néanmoins voir changer « le climat social et le bien-être » dans le pays et résume le bonheur à quatre piliers fondamentaux : « famille, amis, et puis ne pas manquer, […] et la santé ».
La santé, c’est aussi ce que répondent Marie-Paule et Michel à la question « Quelle est la chose la plus importante dans votre vie ? ». Lui voit la France comme le pays de la liberté, tandis qu’elle aime le plus la mer en France. Autant de réponses qui illustrent la diversité des personnes rencontrées. Quant aux clichés de François Bonnière, seront-ils exposés au Louvre ? Réponse dans quelques mois.