L’annonce a été faite à l’occasion de la cérémonie des vœux de La Verrière, le 10 janvier. L’aménagement du futur quartier gare-Bécannes, qualifié d’un des 2 « projets du siècle » par le maire LR de la commune, Nicolas Dainville (l’autre étant bien sûr les rénovations au Bois de l’Étang), a depuis septembre un nouvel architecte.

L’ex-architecte, initialement désigné par l’agglomération de SQY (l’aménageur) pour ce projet qui verra le jour dans le cadre d’une Zac (Zone d’aménagement concerté), ne convenait pas à la Ville. Nicolas Dainville explique que « malgré la qualité de l’architecte », le projet présentait une architecture « beaucoup trop froide, contemporaine, cubique ».

Logements, groupe scolaire, équipements publics, commerces, lieux de verdure

Il a alors fallu relancer des appels d’offres, et c’est finalement une pointure de l’architecture qui en est sortie vainqueur, en septembre donc. Et même « le meilleur architecte du monde », selon le maire de La Verrière. Il s’agit de Xavier Bohl. Cet architecte de renom, qui a des projets dans le monde entier, est un disciple de François Spoerry, qui a notamment imaginé la cité lacustre de Port-Grimaud (Var). C’est d’ailleurs bien ici qu’est basé son cabinet d’architecture, l’atelier Xavier Bohl. Mais il a aussi œuvré en Île-de-France, où « on a pas mal de projets autour de l’eau, de la nature », a-t-il notamment déclaré lors des vœux de La Verrière. Dont le projet de cité-jardin au Plessis-Robinson, pour lequel il a été plusieurs fois primé.

À La Verrière, Xavier Bohl sera architecte, urbaniste et coordinateur pour l’aménagement du futur quartier, dont l’implantation est prévue sur 7 ha en cœur de ville (autour de la gare, sur l’îlot Denis Forestier, sur l’ex-site de l’Ehpad, dont les bâtiments ont été détruits et dépollués, d’après l’architecte) et 40 ha sur la zone des Bécannes, sans oublier la zone de l’Agiot. « Je serai un peu le chef d’orchestre du quartier. Il y aura probablement différents promoteurs, différents architectes, comme il y a dans un orchestre différents musiciens, mais moi je suis un peu en charge de la symphonie, de l’ensemble, pour ce ne soit pas une cacophonie », illustre-t-il.

Xavier Bohl pourra donc mettre en œuvre à La Verrière sa méthode, celle de l’architecture douce « Le contraire, c’est le brutalisme : les barres, les grands ensembles, l’architecture tirée à la mitraillette, avec toutes les maisons pareil, et des immeubles de grande hauteur, a-t-il commencé par expliquer. L’architecture douce, elle, s’intègre en douceur, proche de la végétation, des gens. Elle ne heurte pas, ne violente pas le paysage, essaie de s’intégrer au maximum avec l’environnement. On appelle aussi cela ‘’architecture intégrée’’, car on emboîte ensemble les éléments de la ville : commerces, services municipaux, pôle de santé, certains logements sociaux, certains logements libres, les écoles. Tout ça est imbriqué comme une ville ancienne. »

Et de poursuivre : « Le contraire, c’est le zoning, […]. Quand vous zonez, vous avez l’impression que c’est facile, car chacun peut faire son petit truc dans son coin. Pour réintégrer les choses ensemble, il faut réfléchir, et pour que l’architecture soit charmante, il faut aussi changer les matériaux, les couleurs, que les maisons soient toutes différentes. »

Xavier Bohl est un adepte de l’architecture douce, qui « s’intègre en douceur, proche de la végétation, des gens », et « ne heurte pas, ne violente pas le paysage ».

Pas donc d’uniformité entre les futurs bâtiments. « Il y aura une différence polychromique, et c’est une architecture inspirée de l’esprit de la région, […] car c’est ce qui va durer dans le temps, c’est ce qui n’est pas à la mode, développe Xavier Bohl. Ça n’est pas des immeubles en pointe d’avion, des cubes avec des grillages autour […]. On va piocher dans la tradition, dans les villes du passé […]. On fait, avec nos moyens contemporains, une architecture contemporaine, mais qui n’a pas coupé ses racines avec autrefois. »

Concrètement, à La Verrière, comment va se manifester cette méthode ? « [Il y aura] des façades traditionnelles, qui ont des toits pentus, avec une belle place conviviale, dans notre cœur de ville, pour avoir des commerces de proximité, des services qui profiteront à tous les habitants, y compris aux habitants d’Orly parc qui habitent juste à côté, et aux habitants du village et du Bois de l’étang, développe Nicolas Dainville. On veut de la verdure, des espaces de promenade, pour avoir une vraie ville à la campagne. On veut des rues charmantes pour respecter cet esprit village auquel nous sommes tant attachés. » Le maire révèle que La Verrière s’est notamment inspirée de Poundbury, ville d’Angleterre conçue sur la volonté de l’actuel roi d’Angleterre Charles III.

1 500 logements dont environ 5 % de sociaux

Sur ce futur quartier gare-Bécannes, sortiront de terre 1 500 logements (1 000 sur le terrain des Bécannes, 500 sur la partie cœur de ville). Parmi eux, « une bonne partie » devraient être en maison individuelle, espère Xavier Bohl. « [Des maisons où] chacun peut mettre ses 2 voitures dans son terrain, chacun a un jardin, et chacun est chez soi. Je suis contre le fait que les gens habitent en copropriété et se réunissent le soir pour savoir qui va repeindre l’immeuble, qui va payer l’ascenseur, confie-t-il. J’ai une grande affection et une grande motivation pour la maison individuelle. Mais il y aura quand même beaucoup d’appartements. »

Parmi ceux-ci, très peu devraient être du logement social. « Il n’y aura pas beaucoup de logements sociaux, car la commune est déjà très dotée (72 %, Ndlr), rappelle Xavier Bohl. L’objectif est vraiment de rééquilibrer la composition sociale de la ville. » Nicolas Dainville, lui, parle d’environ 5% de logements sociaux. Comme profil-type de futurs habitants, Xavier Bohl mentionne plutôt « des primo-accédants, des jeunes familles, ou des personnes un peu plus âgées, qui veulent vivre en appartement, et des familles tout court ».

L’architecte fait aussi savoir que les constructions se voudront raisonnables en termes de hauteurs, avec du « R+2+ combles, et par endroits, dans les éléments centraux, R+3+combles », tandis que, selon lui, « le précédent projet, qu’on a combattu, proposait des immeubles de 5 ou 6 étages ». « Peut-être qu’à l’Agiot, ce sera un peu plus haut, car on veut se protéger de la N 10, et la N10 est très bruyante, donc l’idée c’est d’avoir quelques bureaux et de l’activité, pour de la protection phonique et des emplois », ajoute-t-il.

Le projet comportera aussi bien sûr des commerces, notamment en cœur de ville, ainsi, comme l’évoque Xavier Bohl, qu’une « salle multisports », « des résidences étudiantes », « des jardins, des lieux de promenade, de convivialité, de verdure », et « un groupe scolaire de 24 classes, maternelles et élémentaires ». « On aimerait bien racheter l’ERPD dans le cadre de la Zac pour en faire notre futur bâtiment scolaire, précise Nicolas Dainville sur ce dernier point. Il y a des négociations avec la Région, […]. On entame un cycle très concret mais assez long. »

En effet, il faudra s’armer de patience pour voir le projet prendre forme. « C’est un projet très compliqué, car il y a énormément d’études d’impact, concède le maire de La Verrière, citant les différentes études d’impact à valider, sur la circulation, la police des eaux, les groupes scolaires, ou encore les équipements publics. « Et il faut plusieurs autorisations, [notamment] des ABF (Architectes des bâtiments de France), car on est tout près du château. [Il faut aussi] l’autorisation du préfet des Yvelines, car on est en zone OIN (Opération d’intérêt national) Paris-Saclay. »

« Il y a eu énormément d’études d’impact, sur l’habitat naturel [par exemple], qui sont déjà faites », indique l’élu, se disant optimiste pour les études d’impact et autorisations restantes. « Mais je crains que la 1re pierre, ce sera soit à la fin du mandat, soit au début de l’autre, glisse-t-il. On va tout faire pour aller le plus vite possible, mais il y a quand même pas mal d’obstacles, des incertitudes. »

Pour l’aménagement plus complet, il faut encore se projeter plus loin, ajoute-t-il : « À la fin du mandat qui suit, on aura un beau cœur de ville. » Le futur quartier devrait aussi permettre à La Verrière, qui compte aujourd’hui un peu plus de 6 000 habitants, d’augmenter considérablement sa population. Mais « c’est vraiment sur 20 ans, temporise le maire. Je crois que c’est 2 ans par centaine de logements. »

Quand ce projet à très long terme sera finalisé (à l’horizon de 20 ans), il devrait en tout cas transformer la ville. « On aura une vraie centralité, un vrai cœur de ville, et aussi la possibilité d’attirer plus de services, se réjouit Nicolas Dainville. Aujourd’hui, on n’est pas attractifs et on n’a pas de vraie centralité. Là, on aura un cœur battant, qui va permettre d’avoir de nouveaux services, de nouveaux commerçants, d’avoir même un lieu de vie, avec pourquoi pas la possibilité pour la Ville d’y organiser des événements … Ça va transformer la ville, et même, ça nous permettra financièrement d’être plus autonomes, car on est totalement dépendants des partenaires aujourd’hui. »

Pour marquer un 1er aboutissement, le maire et l’architecte aimeraient « lancer une 1re opération témoin, qui va un peu donner le lancement de l’opération », révèle Xavier Bohl, parlant de « 60 logements, avec des commerces, en face des petits commerces de la rotonde, tout près de la gare ». L’architecte-urbaniste l’a assuré lors des vœux auprès de la population : « On voudrait vraiment qu’il y ait un cœur battant, un cœur vivant à La Verrière, et on va s’attacher à faire ça. Il y a beaucoup d’obstacles, mais on va les franchir. »

CREDIT PHOTOS : Atelier Xavier Bohl