La direction SNCF parle d’un plan de réorganisation du service client, pour satisfaire les voyageurs. Les syndicats, eux, dénoncent un plan social. Ils étaient une cinquantaine réunis devant la gare de Versailles-Chantiers, le mardi 9 novembre. Les syndicats CGT, Sud ou encore les salariés de la SNCF ont manifesté contre le projet de suppression de 20 % des postes d’agents commerciaux sur les lignes N et U qui passent par Saint-Quentin-en-Yvelines (SQY).

« Pour nous, c’est un vrai recul »

Ils ont aussi pointé la fermeture des guichets de gares, impliquant notamment Plaisir-les-Clayes et son service commercial. La gare de Trappes, elle, devrait ne plus avoir d’agents le soir dès 20 h. Pour Villepreux-les-Clayes, les guichets vont fermer le week-end, et ils seront clos six jours sur sept à Coignières. Et toutes ces mesures devraient être effectives en mars 2022, selon Matthieu Bolle-Reddat, secrétaire général yvelinois de la CGT cheminot et leader de la manifestation. Sachant que le guichet commercial à la gare de SQY devrait aussi fermer fin 2022.

« Ce sont des mesures qui visent à faire de pures économies. Et ils osent appeler ça ‘’Satisfaction voyageur’’. Ils ne veulent plus de gens dans les gares », affirme-t-il devant les autres manifestants ce matin-là, avant d’ajouter : « Il faut faire des actions coups de poing. C’est une guerre longue qui s’annonce. Ça va prendre plusieurs mois. »

D’ailleurs, ce n’est pas la première fois que les syndicats et salariés de la SNCF se mobilisent sur plusieurs mois pour lutter contre des suppressions de postes, qui impliquent la fermeture de guichets de vente pour les tickets et passes Navigo en gare. En octobre 2018 et en mars 2019, ils avaient déjà manifesté avec notamment le soutien de certains partis politiques comme Génération.s. Leur combat avait conduit au report d’une partie de ce plan de réorganisation.

Mais cette année, la direction SNCF semble vouloir remettre le couvert. « Aujourd’hui et après les séquences électorales locales passées, la direction de la SNCF a donc indiqué vouloir mettre ce projet en œuvre », confirme dans un communiqué Nicolas Hue (Générations.s), conseiller municipal aux Clayes-sous-Bois. Et cela pourrait avoir des conséquences sur les usagers et les salariés, selon l’élu et les syndicats présents à la manifestation. « Pour nous, c’est un vrai recul », affirme l’élu.

En matière de sécurité ferroviaire, notamment, les manifestants dénoncent une augmentation des dangers potentiels en gare et sur les quais. Dans une gare sans agent, « le jour où il y a un pète sur une ligne, il y a personne pour prendre en charge les usagers, les handicapés, les étrangers, et les personnes âgées », imagine une militante CGT, qui travaillait auparavant à la gare de SQY.

Des équipes mobiles de ligne ont été mises en place

Pourtant, des équipes mobiles de ligne (EML) ont été mises en place, il y a deux ans, pour répondre aux nouveaux besoins des usagers, dits plus autonomes grâce aux nouvelles technologies, selon la direction des relations institutionnelles de la SNCF – Transilien (voir notre édition du 27 mars 2019). Ces nouvelles équipes véhiculées ont pour rôle de venir en aide aux clients dans le besoin.

Mais elles aussi seraient touchées par la réorganisation de la direction, selon les syndicats. « Ils vont aussi supprimer des postes EML, donc ça va être encore plus compliqué », se désole Delphine, agent commercial SNCF à la gare de SQY. D’ailleurs, ces équipes mobiles devraient ne plus avoir de voiture pour n’utiliser que le train lors de leurs déplacements, complète Johann, agent de réserve dans la même gare.

Cette situation risquerait alors de mettre encore plus le voyageur en difficulté, surtout s’il est en situation de handicap, ou si c’est une personne qui est victime de la fracture numérique. « Tout le monde ne sait pas écrire ou lire. Tous les tarifs ne sont pas dans l’automate », explique une militante, manager de maîtrise sur la ligne N, qui va d’ailleurs voir son poste supprimé dans le cadre de la réorganisation. « Je vais être rétrogradée à un poste d’exécution. C’est un manque de reconnaissance, j’ai 24 ans de carrière dans l’entreprise », lance-t-elle scandalisée.

Alors, quel reclassement attend les salariés concernés par le projet de suppression de postes ? Ces derniers s’en inquiètent justement. Devant le directeur des relations institutionnelles SNCF – Tansilien, Erwan Forner, les manifestants s’expriment, vindicatifs. « Parmi les 20 % de postes supprimés, certains salariés ne pourront pas être reclassés. Ils ne pourront pas être mutés », accuse le secrétaire général yvelinois de la CGT cheminot. Un père de famille va d’ailleurs s’exprimer sur son inquiétude quant à son reclassement et à sa famille qui compte sur lui.

« C’est une boîte qui méprise ses agents »

Les discours sont virulents. Chacun leur tour, ils vont prendre la parole face à la direction, et les reproches sont vifs. « Vous nous détruisez » ; « C’est une boîte qui méprise ses agents » ; « Cette boîte ne me fait plus envie » ; « Vous déshumanisez les gares ». En guise de réponse, Erwan Forner a pris en note les déclarations de chacun, sûrement pour revenir vers eux plus tard avec des explications ou des propositions.

Contactée par La Gazette, la SNCF a apporté une première réponse : « Nous travaillons actuellement à une prochaine évolution des services en gare, mieux adaptés aux nouveaux comportements des voyageurs. La réflexion est en cours, nous n’avons donc pas d’éléments à vous transmettre à ce jour. » En attendant, le combat devrait « monter en puissance », selon Matthieu Bolle-Reddat, qui a appelé à d’autres mobilisations.